par Jean-Marc Barféty
Version de février 2016
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Introduction
Parler d'histoire familiale pour Jean
Genet est presque antinomique, tant le personnage ne semble se rattacher à
aucune famille, lui l'enfant de l'Assistance publique. Et pourtant, il a existé
une famille Genet avant que Jean Genet n'apparaisse, même si cette histoire
familiale semble entourée de la plus grande obscurité. Certes, nous possédons
quelques informations sur sa mère, plus complètes suite aux travaux d'Albert
Dichy et Pascal Fouché[1], et des bribes d'information
sur ses grands-parents maternels François et Clotilde Genet. Cependant, il
semble être sorti de nulle part. Ce que l'on sait aujourd'hui de ses origines
est bien résumé dans la biographie que lui a consacrée Edmund White :
« Camille Gabrielle Genet avait
tout juste vingt-deux ans. Elle était née en 1888 à Lyon : de François,
cinquante-six ans, et de Claudine (Clotilde) Genet, âgée, elle de quarante-deux
ans. L'enregistrement de la naissance de Camille à Lyon le 20 juillet, deux
jours plus tard, porte la signature du père – à notre connaissance, l'unique
trace écrite laissée par l'un des
ascendants de Genet. Trois ans après, en 1891, la famille de François Genet
avait disparu, en tout cas de Lyon. François Genet vagabonde sans doute,
manœuvre sans terres, ni métier, ni attaches particulières à Lyon. Sur les deux
documents d'état civil dont on dispose, le père est qualifié tantôt de « manœuvre »,
tantôt d'« employé » ; la mère de « couturière » ; Gabriel,
le fils qui avait seize ans à la naissance de Camille, de « serrurier »
; une petite fille de neuf ans appelée Léontine : voilà la famille. »[2]
« François Genet vagabonde sans
doute, manœuvre sans terres, ni métier, ni attaches particulières ». Ces
quelques mots décrivent la vie du grand-père de Jean Genet presque comme une
préfiguration de celle de son petit-fils : une vie de vagabond, encore pleine
d'obscurité, avant d'être celle de l'écrivain que l'on sait, mort seul dans un
hôtel parisien. C'est cette obscurité même qui m'a donné envie de percer le
mystère des origines familiales de Jean Genet. Pour cela, j'ai vite pensé que
la clé résidait dans l'identification de François Genet. Ni ce prénom, ni ce
nom n'étaient des indices suffisants[3]. Pourtant, il m'a fallu
moins d'une heure pour trouver son décès. A partir de là, toute l'histoire de
la famille maternelle de Jean Genet a commencé à se dévoiler. Fruit de ces
recherches, c'est cette ébauche d'histoire familiale que je présente aujourd'hui.
Elle est centrée autour de la personne de François Genet et de sa descendance car
ce que l'on a pu reconstituer de leurs vies éclaire en partie le contexte de la
naissance de Jean Genet et l'abandon qui en a résulté. Nous allons ainsi voir
surgir une personnalité, un destin, une histoire familiale qui, par certains
aspects, sont fort différents de ce que l'on peut imaginer en ne connaissant
que la vie de Jean Genet.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, je
rends un hommage à un ouvrage très inspirant pour moi : Le monde retrouvé de Louis-François Pinagot d'Alain Corbin. En le
paraphrasant, j'ai eu aussi le sentiment de décrire « le monde retrouvé de
François Genet ». Certes, à la différence d'Alain Corbin, je n'ai pas
choisi mon personnage au hasard, c'est mon intérêt pour Jean Genet qui me l'a
fait choisir. Cependant le défi restait le même : comment reconstruire une vie
à partir de presque rien. Nous verrons qu'à la différence de Louis-François
Pinagot, François Genet a laissé beaucoup de traces dans les archives et même
dans les journaux.
François Genet voit le jour le 1er
juin 1831 dans le petit hameau de Vollien, sur la commune de Cuzieu, village du
Bas-Bugey dans le département de l'Ain. Il est le fils d'Anthelme Genet et de
Pierrette Laperrière[4].
Virieu-le-Grand,
Cuzieu et le Bas-Bugey.[5]
La vie des ancêtres de Jean Genet s'est
essentiellement déroulée dans deux communes de l'Ain, dans le Bas-Bugey : Virieu-le-Grand,
chef-lieu de canton, et le village voisin de Cuzieu. Située au sud-est du
département de l'Ain, proche de l'Isère et de la Savoie, cette petite région
est bordée à l'est par le Rhône, qui forme la frontière géographique avec la
Savoie. Au début de l'époque qui nous intéresse, c'était aussi une frontière politique
entre la France et le Royaume de Piémont-Savoie. Géographiquement, cette région
forme le sud du massif du Jura, ce qui lui donne encore un caractère
montagneux. Le point culminant est le Grand Colombier, à 1 531 m d'altitude.
Du point de vue du climat, son ouverture vers le sud lui donne un climat moins
rude que celui du Jura.
La principale ville est Belley,
sous-préfecture d'à peu près 5 000 habitants au milieu du XIXe
siècle. Virieu-le-Grand est à 12 km au nord de Belley. Les grandes agglomérations
sont Lyon à 100 km, Bourg-en-Bresse, à 80 km et Grenoble à une centaine de km.
Néanmoins, il est unanimement reconnu par les historiens et les géographes que
cette région fait partie de l'espace économique lyonnais.
Au XIXe siècle, Virieu-le-Grand
est un bourg d'un bon millier d'habitants situé à la confluence de plusieurs
vallées, ce qui en fait une zone de passage entre le reste du département de l'Ain,
par la Cluse des Hôpitaux, la Savoie, à laquelle on accède par Culoz, et l'Isère.
Cela explique aussi l'ancienneté de la commune, qui existait déjà à l'époque
romaine. C'est une commune agricole, avec une prédominance de la culture de la
vigne, complétée par de la polyculture. Décimée par le phylloxera à la fin du
XIXe, la vigne a quasiment disparu, même s'il reste quelques crus
dans la région. Virieu-le-Grand est ainsi décrite au début du siècle par le
préfet Bossi :
« Cette
commune est située au pied d'une haute montagne, à 1 myriamètre au
Nord-Nord-Ouest de Belley, et contient 144 maisons.
Son territoire présente une petite
plaine environnée de coteaux implantés en vignes, et adossés aux montagnes qui
sont tout autour. On y fait du vin d'assez bonne qualité, et on y récolte des
blés de toute espèce et du foin.
Une partie de la surface de ce
territoire est en marais, rochers et terrains incultes. Les bois y sont plus
que suffisans pour la consommation du pays.
La seule industrie des habitans
consiste dans le commerce de quelques bois, et dans la fabrication du pain qu'ils
vont débiter dans les communes voisines. »[6]
Historiquement, Virieu-le-Grand est
connu comme la patrie de Philippe Berthelier, l'un des pères de l'indépendance
de Genève, d'Honoré Fabri, théologien et physicien, découvreur du principe de
la circulation sanguine. Cependant, la personnalité la plus marquante est
Honoré d'Urfé. Bien qu'issu d'une famille noble du Forez, il est seigneur de
Virieu-le-Grand par héritage familial en 1599. A ce titre, il possède le
château situé au-dessus du bourg. Détruit par un incendie en 1726, il n'en
reste que quelques ruines. L'histoire veut que ce soit dans ce lieu qu'Honoré d'Urfé
rédigea l'œuvre qui l'a rendu célèbre, le premier roman français : L'Astrée.
La commune de Cuzieu
est située sur un plateau au-dessus de Virieu-le-Grand. Alors que Virieu est
essentiellement constitué du bourg, avec quelques habitations isolées, Cuzieu
est composé de plusieurs hameaux, qui sont, pour les principaux : Vollien,
Fesne, Donalèche, Verupt et le village de Cuzieu lui-même. Commune de 384 habitants
en 1831, population qui restera stable au cours du XIXe siècle, c'est
un village uniquement agricole : « Cuzieu […] est placé sur les
collines qui séparent le vallon de l'Arène de la vallée du Séran inférieur. Une
robuste végétation et de magnifiques noyers lui forment une ceinture que le
touriste ne franchira pas, s'il tient à conserver ses illusions. Quant à nous,
obligé pour remplir fidèlement notre mission d'historien et de cicérone, de
tout visiter et de tout raconter, nous avons dû, laissant de côté nos scrupules
et nos préventions, nous aventurer à travers un dédale de ruelles infectes où
le purin coule de toutes parts ; au milieu de masures de chaume, parmi
lesquelles nous distinguons pourtant une habitation qui semble viser à singer
le château. L'église, que l'on ne découvre qu'avec bien de la peine, est aussi
pauvre et d'aussi piètre apparence que les autres masures » et « Le
touriste évitera d'entrer dans Saint-Martin de Bavel, où il serait exposé,
comme à Cuzieu, à respirer les odeurs nauséabondes du fumier et des ordures qui
encombrent le seuil des habitations, uniquement composées, pour la plupart du
moins, d'une pièce délabrée, à l'aspect repoussant, où gens et bestiaux vivent
fraternellement pêle-mêle. ». Pour finir sur une note plus positive :
« Si l'intérieur des deux derniers villages, que nous venons de traverser,
est loin d'être attrayant, par contre, leurs environs sont fort agréables.
Chaque vallon est arrosé par un joli ruisseau ; on pourrait même dire trop bien
arrosé, car la quantité des eaux y forme, par-ci par-là, des marécages et
plusieurs lacs grands ou petits, dans lesquels le poisson foisonne. On y trouve
des perches et des brochets de belle qualité ; tandis que truites, anguilles et
écrevisses abondent dans les moindres ruisseaux. »[7]
La
famille Genet, de Cuzieu
Avant d'aborder la vie
de François Genet, quelques mots sur la famille Genet. Le nom de Genet s'avère
relativement courant dans la région. Au gré des recherches dans les communes de
l'Ain, autour de Belley, on rencontre souvent ce patronyme. En 1896, premier
recensement disponible de Virieu-le-Grand, 12 ménages sur 339, soit 40 personnes
sur 1148 portent ce nom. Signalons au passage que nos recherches n'ont pas
permis d'en éclairer l'origine. On peut donc encore laisser courir l'imagination
comme Jean Genet le faisait lui-même dans Le Journal du voleur
(1949) : « Quand je rencontre dans la lande – et singulièrement au
crépuscule, au retour de ma visite des ruines de Tiffauges où vécut Gilles de
Rais – des fleurs de genêt, j'éprouve à leur égard une sympathie profonde. Je
les considère gravement, avec tendresse. Mon trouble semble commandé par toute
la nature. Je suis seul au monde, et je ne suis pas sûr de n'être pas le roi –
peut-être la fée de ces fleurs. Elles me rendent au passage un hommage, s'inclinent
sans s'incliner mais me reconnaissent. Elles savent que je suis leur représentant
vivant, mobile, agile, vainqueur du vent. Elles sont mon emblème naturel, mais
j'ai des racines, par elles, dans ce sol de France nourri des os en poudre des
enfants, des adolescents enfilés, massacrés, brûlés par Gilles de Rais. »[8]
La famille Genet de Cuzieu trouve son
origine en la personne de Barthélemy Genet, baptisé à Cuzieu le 6 janvier 1686[9]. A deux exceptions près,
il est à l'origine de toutes les familles Genet de Cuzieu dont on peut suivre
la trace jusqu'à la première moitié du XXe siècle. Depuis la fin du
XVIIe siècle, à partir de Donalèche, la famille s'est largement
ramifiée à travers les différents hameaux du village, avec des destins assez différents.
La branche aînée a acquis une certaine notabilité locale. Elle a donné deux
maires à la commune : Antoine de 1848 jusqu'à son décès en octobre 1868 et son
fils Louis-Benoît, qui succède à son père jusqu'en 1884, avec une interruption
entre 1876 et début 1878. Ironie de l'histoire, le nom de celui-ci apparaît
dans la liste des jurés de la cour d'assises de l'Ain, en 1879[10]. On ne peut s'empêcher de
penser à cet extrait du Condamné à
mort : « Les jurés, offensés par tant de grâce, stupides mais pourtant
prestigieux dans leur rôle de Parques ». Les autres branches ont eu des
situations sociales plus modestes.
La branche à laquelle appartient
François Genet est représentée au moment de la Révolution par Marin Genet, né
le 10 avril 1763, au hameau de Donalèche à Cuzieu, fils cadet de Benoit Genet (1727-1813)
et Marie Cottet (1728-1779). Ce cadet de famille a la chance de pouvoir se
marier le 12 janvier 1790 avec Jeanne Pernet, la fille unique d'Anthelme Pernet
et Marie Charvin. Comme l'on sait, dans ce monde de petits propriétaires-cultivateurs
terriens, où l'importance sociale est directement liée à la propriété foncière,
la possibilité d'épouser une fille unique, dotée de son patrimoine ou de ses
« espérances », est un atout et le moyen d'améliorer sa situation de
cadet. C'est ainsi que Marin Genet peut « entrer en gendre » dans la famille
Pernet, c'est-à-dire venir vivre chez ses beaux-parents afin de leur succéder
le moment venu. Anthelme Pernet est un petit notable de Cuzieu. Il sait signer
son nom, ce que ni Marin Genet, ni ses parents, ni sa femme ne savent faire. Il
fait partie des signataires du cahier de doléances de Cuzieu le 8 mars 1789. Enfin,
par délibération du 20 nivôse an 2 (9 janvier 1794), il est nommé officier
municipal de la commune de Cuzieu. Installés chez les beaux-parents à Vollien,
autre hameau de Cuzieu, Marin Genet et Jeanne Pernet auront 12 enfants, 7
garçons et 5 filles, nés entre 1791 et 1818, dont un seul ne vivra pas, fait
rare à l'époque. Les filles se marient toutes, sauf une, avec des cultivateurs
de Cuzieu. Les garçons ont des destins divers. Trois garçons restent à Cuzieu,
comme cultivateurs : Benoit (1796-1884), l'aîné, Anthelme (1800-1881), le père
de François, et Marin (1810-1879), resté célibataire. Les trois autres garçons
vont faire leur vie ailleurs, abandonnant par la même occasion l'agriculture
qui avait été l'occupation et le gagne-pain de leurs ancêtres. Jean-Louis (1814-1890)
et Mémond (1818-1898) font carrière dans les douanes. Rappelons que l'Ain était
alors frontalier avec la Savoie, terre étrangère, dont il est séparé par le Rhône.
Enfin Jean (1803-1891) s'installe comme menuisier à Lyon, ville dont on verra l'importance
qu'elle a pour l'histoire de la famille. A cette génération, on voit apparaître
les premières signatures chez les garçons (c'est le cas pour tous, sauf Marin).
Les filles devront attendre la génération suivante pour maîtriser cet élément
de base de l'écriture. Les parents sont morts jeunes, Marin Genet le 15 juillet
1822 à 58 ans et Jeanne Pernet le 27 janvier 1825 à 52 ans.
Anthelme
Genet, le père de François Genet
Nous ne savons évidemment rien de la
jeunesse d'Anthelme Genet, l'arrière-grand-père de Jean Genet. Nous le
retrouvons en avril 1825 lorsqu'il épouse Claudine Miraillet, de Cheignieu.
Douanier à Morestel dans l'Isère, où naît sa fille aînée Julie en 1826, il
revient ensuite comme cultivateur à Vollien. Devenu veuf en 1828, il se remarie
rapidement, le 11 mai 1830, avec Pierrette Laperrière, d'Anglefort, un bourg de
l'Ain, au sud de Seyssel, au bord du Rhône, à une vingtaine de kilomètres au nord
de Cuzieu. De ce mariage sont issus 7 enfants, tous nés à Vollien, dont l'aîné François
:
- François, né le 1er juin 1831
- Jean Louis, né le 4 août 1833
- Dodon, né le 4 juillet 1837 (à l'usage, il se prénomme Claude, plutôt que le très inhabituel Dodon)
- Julie, née le 14 juin 1840
- Louis, né le 13 janvier 1844, dont on perd la trace. Il n'a pas laissé de descendance.
- Louise, née le 26 février 1846
- Julie, née et morte le 18 septembre 1853
- François, né le 1er juin 1831
- Jean Louis, né le 4 août 1833
- Dodon, né le 4 juillet 1837 (à l'usage, il se prénomme Claude, plutôt que le très inhabituel Dodon)
- Julie, née le 14 juin 1840
- Louis, né le 13 janvier 1844, dont on perd la trace. Il n'a pas laissé de descendance.
- Louise, née le 26 février 1846
- Julie, née et morte le 18 septembre 1853
Nous savons fort peu de choses de la
vie d'Anthelme Genet et Pierrette Laperrière. Cultivateurs à Vollien, ils sont
morts à un âge avancé : 81 ans pour Anthelme Genet[11] et 79 ans pour Pierrette
Laperrière[12].
Ils laissent un modeste patrimoine foncier, qui appartient majoritairement à l'épouse
: une simple maison à Vollien, comprenant une cuisine, une chambre, un galetas
et une cave, un jardin, quelques près, terres et vignes totalisant 1 hectare et
30 centiares. Comme on l'imagine, un patrimoine qui permet de vivre que très
chichement. Autre complément de ressources, ils sont parents nourriciers d'enfants
de l'Hospice de la Charité de Lyon. Au gré de l'état civil, on repère Jean
Pierre Gonnand, enfant de la Charité de Lyon, mort chez eux le 10 mars 1845,
âgé de 15 jours. On trouve deux autres décès en mai 1847 et juin 1848. Cela
prend une résonance particulière lorsqu'on connaît l'histoire de leur
arrière-petit-fils ![13]
La modestie de ce patrimoine explique
aussi que parmi les 6 enfants, seule une fille est restée au pays. Julie Genet,
la fille aînée du premier mariage, épouse Louis Gros, cultivateur de Vollien. Elle
aura une descendance qui restera dans la région et que l'on suit jusqu'au
milieu du XXe siècle.
François
Genet
Comme pour son père ou ses frères et
sœurs, nous ne savons rien de sa jeunesse. Il a cependant bénéficié d'un
minimum d'éducation, lui permettant l'accès à la lecture et l'écriture. On le
retrouve pour la première fois le 9 avril 1855 lorsqu'il achète une vigne d'une
dizaine d'ares à Cuzieu pour 100 francs[14]. Il paye cette
acquisition avec l'argent gagné comme domestique au service de M. Saint-Pierre,
à Virieu-le-Grand[15]. C'est une démarche
conforme à la mentalité de ces petits propriétaires. Tous les efforts sont
tendus vers la constitution, puis le maintien d'un patrimoine, aussi modeste
soit-il[16]. On le retrouve ensuite le
19 janvier 1858 lorsqu'il épouse à l'âge de 27 ans Marie Louise Pilloux, fille
unique de Philibert Pilloux[17], charron à Virieu-le-Grand.
Quelques jours auparavant, ils sont passés à l'étude de Me Jurron,
notaire à Virieu[18].
Là-aussi, le contrat est classique dans ce milieu de petits propriétaires. L'épouse
apporte une dot, qui n'est composée que de ses espérances futures et de son
trousseau. L'époux est déjà riche d'une somme de 1 000 francs, somme
importante pour l'époque, composée d'argent comptant, de créances et d'un livret
d'épargne. En revanche, ses parents ne lui donnent quasiment rien, seule sa
mère lui fait donation de 200 francs. Comment et où François Genet a-t-il pu
économiser cette somme ? Qualifié de cultivateur, ce n'est sûrement pas en exploitant
le très modeste domaine de ses parents ni sa toute récente vigne qu'il a pu se
constituer ce pécule. A-t-il pu économiser suffisamment sur ses gages de
domestique ? On peut aussi imaginer, simple conjecture, qu'il a déjà fait
ses premières armes dans le commerce.
Tout de suite après le mariage, il
vient vivre à Virieu-le-Grand, où, au début, il est toujours cultivateur. Comme
son grand-père Marin Genet, il entre « en gendre » dans la famille
Pilloux, opportunité pour un fils de famille sans patrimoine. Cela veut aussi dire
qu'il a toutes les qualités requises pour que ses beaux-parents l'agréent comme
gendre. Ils ont d'ailleurs un petit domaine à Virieu, composé de 2 vignes, une
terre et une maison. Il est clair que ce n'est pas suffisant pour faire vivre
une famille qui s'est très rapidement constituée après le mariage avec l'arrivée
de deux enfants :
·
Jules Philibert, né à
Virieu-le-Grand le 2 avril 1859 (le prénom d'usage est Philibert)
·
Marie Françoise, née à
Virieu-le-Grand le 17 juillet 1861
En même temps, signe de son
installation dans la vie, après le début modeste, il commence à se constituer
un patrimoine foncier. Le 4 février 1860, il achète un petit domaine de 39 ares,
composé de vignes, terre et bois à Virieu-le-Grand pour la somme de 900 francs
qu'il paye comptant[19]. Le 30 avril 1863, il poursuit
ses acquisitions par l'achat d'une vigne, d'une terre hautinée, d'un petit
jardin au village (96 m2 !) et d'une écurie pour la somme de 1 600
francs, qu'il ne paye qu'en partie[20]. C'est aussi à ce
moment-là qu'il commence à s'endetter. On sait qu'à la même époque, le 16
décembre 1861, son frère Claude Genet lui prête 1 500 francs. L'écurie,
entourée de 2 granges, se situe dans la partie basse du village, dans une zone
où le bourg est en train de se développer, descendant des hauteurs où il se
trouvait. Ce développement est aussi lié à la construction de la gare et la
constitution d'un quartier autour[21]. Ainsi, François Genet
transforme (ou remplace) cette écurie en une nouvelle maison, qui va lui
permettre de s'installer comme marchand-épicier[22]. C'est d'ailleurs sous
cette appellation d'épicier ou marchand-épicier qu'à partir de ce moment-là, il
est qualifié dans les actes le concernant[23]. Comment interpréter
cette installation ? En ce début de Second Empire, j'y vois cet esprit
entrepreneur qui se diffuse dans la société. Ce choix de quitter la terre,
choix probablement contraint car l’agriculture seule ne permet pas de vivre, a
été aussi celui de ses deux autres frères et de deux de ses sœurs. En ouvrant
une épicerie, cela lui permet de rester au pays, encore à la différence de ses
frères et sœurs qui doivent tous s'exiler, et de pouvoir accéder à un statut
social supérieur[24].
Enfin, Virieu-le-Grand connaît un regain de prospérité dans la deuxième moitié
du XIXe, consécutive à l'arrivée du train et à l'apparition d'une industrie
de fabrication de chaux qui attire une main d'œuvre étrangère[25]. L'augmentation générale
du niveau de vie qui en découle est propice au commerce. François Genet, que l'on
imagine entreprenant, veut tenter sa chance.
Cette ascension sociale (nous verrons
bientôt ce qui me permet de le dire) est endeuillée par le décès de son épouse
le 16 juin 1866, à l'âge de 28 ans, le laissant avec deux jeunes enfants de 7
et 5 ans.
Comme on l'a vu pour son père, et selon
un usage qui semble assez largement répandu dans la région, il se remarie
rapidement, tout juste un an après le décès de sa première femme. Le mariage
célébré à Virieu-le-Grand le 11 juin 1867 voit s'unir François Genet,
marchand-épicier de 36 ans, et la jeune Clotilde Genet, modiste, seulement âgée
de 21 ans.
Clotilde
Genet
Avant de poursuivre, quelques mots sur
Clotilde Genet, la grand-mère de Jean Genet. Elle est née le 14 novembre 1845 à
Virieu-le-Grand, fille de Jean Genet, dit Peland, charpentier, et Jeanne
Vettard[26]. Elle est enregistrée à l'état
civil sous le prénom de Claudine, mais son prénom d'usage sera toujours
Clotilde, comme l'atteste sa signature elle-même. Elle a un frère, Claude
Genet, qui assurera la continuité de la famille à Virieu-le-Grand, aussi comme
charpentier, et une sœur, Marie Josephte Genet. On trouve cette famille Genet
dès le XVIIIe siècle à Virieu-le-Grand. Il n'y a aucun lien apparent
avec la famille Genet de l'époux. C'est une simple coïncidence. Comme on l'a
dit, il y a de nombreuses familles Genet dans cette région, dont certaines
étaient distinguées par un surnom héréditaire. Dans cette branche, ils sont
généralement surnommés Peland (ou Pelan). Comme souvent dans ces bourgs, chefs-lieux
de canton, c'est surtout une famille d'artisans ou commerçants, ce qui n'exclut
pas une activité de cultivateur et, plus particulièrement à Virieu-le-Grand, de
vigneron. Le grand-père de Clotilde, un autre François Genet, est meunier. Ses
oncles Anthelme et François sont respectivement charpentier et tailleur d'habits.
Sa tante Magdeleine Genet est fabricante d'étoffes à Lyon. Son cousin germain
Joseph Genet est aubergiste, puis épicier. Clotilde Genet est elle-même
qualifiée de modiste et sa sœur Julie de tailleuse.
François
Genet, épicier
Le contrat de mariage qu'ils passent le
11 mai 1867[27]
est très instructif sur l'évolution sociale de François Genet. En effet, là où
il apportait 1 000 francs en 1858, il apporte, 9 ans plus tard, un
patrimoine composé des biens immobiliers qu'il a achetés pour une valeur de 2 500
francs, sans compter l'augmentation de valeur suite à la construction de la
maison, des meubles, des créances « pour raison de son commerce sur diverses
personnes » et enfin des « marchandises de toutes sortes composant son fond de
marchand épicier ». Le tout est estimé à 3 000 francs, dont 2 000
pour les marchandises. Clotilde n'arrive pas sans rien, car elle possède les «
marchandises, ustensiles et accessoires de toute sorte composant le magasin de
modiste qu'elle exploite à Virieu-le-Grand », estimés 1 500 francs et
quelques créances qu'elle possède sur diverses personnes « à raison de son état
et de fournitures par elle faites ». Ainsi, ce jeune couple débute dans la vie avec
un patrimoine immobilier, complété d'une masse active de 5 000 francs. On
voit le chemin parcouru par chacun d'eux, ce qui leur permet d'ailleurs d'être
autonomes et de ne bénéficier d'aucuns dons ou legs anticipés de la part de
leurs parents, à la différence de nombreux mariages à cette époque. Vu leurs propres
situations, les parents auraient été bien en peine de le faire.
Les enfants arrivent vite. A
Virieu-le-Grand, naissent :
- Jules Marie, né le 22 juillet 1868 et mort le 2 août 1868
- Jean Marie, né le 15 juillet 1869 et mort le 22 juillet 1869
- Gabriel François, né le 28 août 1870 (le prénom d'usage est Gabriel)
- Léontine Clotilde, née le 15 juillet 1877 (le prénom d'usage est Léontine)
- Jules Marie, né le 22 juillet 1868 et mort le 2 août 1868
- Jean Marie, né le 15 juillet 1869 et mort le 22 juillet 1869
- Gabriel François, né le 28 août 1870 (le prénom d'usage est Gabriel)
- Léontine Clotilde, née le 15 juillet 1877 (le prénom d'usage est Léontine)
François
Genet, fabricant de chaux
Virieu-le-Grand bénéficie d'un atout.
Le calcaire qui forme ses montagnes est particulièrement propice à la
fabrication de chaux. Pour mémoire, la chaux hydraulique est fabriquée par la
cuisson du calcaire à haute température (1 000°) dans des fours
spécialement construits. En sortie du four, le résultat est de la chaux vive.
Ensuite, un traitement à l'eau permet d'obtenir de la chaux hydraulique ou du
ciment, selon les conditions. C'est une industrie qui demande peu de capitaux,
sauf pour la construction des fours, mais qui nécessite à cette époque une main
d'œuvre importante pour assurer toutes les opérations depuis l'extraction du
calcaire jusqu'à la livraison de la chaux. Il y a trois facteurs importants
pour l'efficacité de cette activité : disposer d'un calcaire de qualité,
bénéficier d'un combustible efficace et économique, c'est-à-dire pouvoir s'approvisionner
en charbon à un prix compétitif, et enfin implanter l'unité de fabrication (les
fours) en un point permettant de minimiser le plus possible le transport de la
matière première et du produit final.
A Virieu, les mines de pierre à chaux,
découvertes en 1842, sont exploitées dès 1855, mais leur importance s'accroît
en 1864 quand Jurron fabrique pour la première fois le ciment de Portland[28]. Bénéficiant d'une bonne
renommée, la chaux de Virieu profite de l'ouverture de la ligne Lyon-Genève qui
permet d'écouler la production locale depuis Lyon jusqu'à Genève et dans les
départements limitrophes : les Savoie, Ain, Jura, Saône-et-Loire, etc.
Après une étape encore « artisanale », l'activité s'organise et des
sociétés se créent : Pochet fils et Cie, à Virieu-le-Grand, au capital
de 40 000 francs, par un acte du 17 septembre 1877 ; Jurron, Delastre
et Cie [29], par un acte du 6 juin
1876. Cette dernière société prendra une grande importance. Elle dispose de
deux dépôts, l'un à Vaise, près de Lyon et l'autre à Genève, aux deux
extrémités de la voie de chemin de fer. En 1907, Virieu-le-Grand dispose de
deux usines (Buscal, héritière des usines Pochet, et Lourdel, qui poursuit l'activité
de la société Jurron et Delastre), qui emploient 60 ouvriers et produisent annuellement
56 000 tonnes de chaux.
Est-ce cette activité en plein
développement qui a donné l'envie à François Genet de se lancer lui aussi ?
Est-ce un goût personnel pour entreprendre ? Est-ce que ce sont les réussites
autour de lui qui l'ont poussé à tenter aussi sa chance ? S'ennuyait-il dans
son épicerie, modeste par la taille ? Nous ne saurons jamais. Ce que l'on sait
de source sûre, c'est ce que l'on peut reconstituer à partir des documents à
notre disposition[30].
C'est ainsi qu'en 1877, François Genet
se lance dans la production de chaux. En janvier 1877, il achète à Antoine
Manjot une parcelle de terrain au Cuchon[31], près de la route
départementale d'Ambérieu à Culoz pour y construire deux fours à chaux. L'emplacement
de cette parcelle nous interroge. Certes, elle est bordée par la route qui
permettra d'apporter la matière première et d'emporter la chaux produite vers
la gare de Virieu. Elle bénéficie aussi d'un écoulement d'eau. Mais elle est
éloignée des carrières, ce qui conduira à beaucoup de transport et manutention.
La raison du choix de cette parcelle est peut-être due à ce que c'est la seule
qu'on a consenti à lui vendre. La situation financière de François Genet est
déjà précaire et les vendeurs sont probablement méfiants. Pour ajouter à notre
présomption, le vendeur, Antoine Manjot, est un cousin de Clotilde Genet, qui a
aussi été un des témoins à leur mariage. François Genet négocie l'achat de la
parcelle au plus juste car le vendeur lui découpe une surface de 664 m2
dans une parcelle de plus grande surface, qu'il doit juger suffisante pour y
installer les deux fours projetés et le hangar pour abriter les blutoirs.
Dans le même temps, il s'associe avec
son frère Claude qui travaille du 7 avril au 15 août 1877 pour construire les
deux fours à chaux sur la parcelle et qui se charge d'aller acheter les briques
réfractaires à Givors, chez Mayet et Catton. Il fait probablement aussi appel à
un entrepreneur isérois, Roybon, qui travaille à Belley. On le retrouvera plus
tard parmi les créanciers, comme d'autres fournisseurs : Faure et Bouvier,
fondeurs, à Grenoble, Mignot-Morel, à Lyon, fournisseur de tissus métalliques,
pour les blutoirs, Charlas frères, à Lyon, fournisseur de matériel pour
moulins, etc. Comme on le constate assez vite, que ce soit l'achat de la
parcelle, les fournitures pour la construction des fours et des blutoirs, le
travail de son frère, tout se fait à crédit. Et ce n'est que le début…
La question des fours étant résolue, il
lui faut se procurer la matière première : le calcaire brut mis à
disposition par la nature sur tout le territoire de Virieu. Il se met d'accord
avec Jean Surgère, qui lui vend une parcelle de 12 ares, proche des ruines du
château de Virieu, au bord de la route[32]. Le prix convenu est de 3 000
francs, dont il ne paye rien au moment de l'achat. Il s'engage à payer et,
comme garantie, il hypothèque tous les biens qu'il possède avec sa femme. Cette
parcelle est vendue comme une terre inexploitée, une « hermiture »,
qu'il doit transformer en carrière. Son emplacement, probablement favorable du
point de vue de la matière première, met en lumière les faiblesses du plan de
François Genet. En effet, il faut traverser tout le village pour mener les
pierres calcaires jusqu'aux fours à chaux, puis ensuite assurer le transport de
la chaux produite jusqu'à la gare.
A peine commencée, les menaces s'amoncellent
au-dessus de l'activité naissante.
L'association qu'il imaginait avec son
frère ne fonctionne pas. Par un exploit d'huissier du 27 septembre 1877, Claude
Genet demande la dissolution de la société entre eux, ce qui lui est accordé
par un jugement du tribunal de Belley le 13 octobre 1877. La cause probable de
la mésentente réside dans le fait que Claude Genet n'est pas payé pour son
travail, ce qui se cumule aux sommes que lui doit déjà son frère[33]. Pendant le même temps,
les créanciers s'activent. Dès le mois de juin, François Genet doit reconnaître
une créance de 520 francs à un charron de la région, pour prêt de chariots. En
juillet, c'est l'entrepreneur de travaux Roybon qui lui fait signer un billet
de plus de 700 francs. En septembre, ce sont ses dettes d'épicier qui le
rattrapent : Joseph Brun et Cie, fabricant de pâtes alimentaires à
Lyon, obtient un jugement du tribunal de Belley pour une dette de 171,75
francs. Ensuite, il est amené à signer d'autres billets. Le plus important est
celui de 927 francs au profit d'un marchand de chevaux de Genève, en décembre
1877. Pour finir l'année, et alors que sa nouvelle activité démarre, c'est le
tribunal de Lyon qui le condamne le 31 décembre à payer 567 francs à Bietrix
aîné et Cie, droguistes, de Lyon.
Pour débuter son activité, il lui reste
deux points à régler : la commercialisation de sa production de chaux et l'approvisionnement
en anthracite, combustible indispensable pour la cuisson du calcaire. N'ayant
probablement pas les moyens d'assurer cela par lui-même, il passe une
convention avec la société Jurron, Delastre et Cie, le fabricant
historique de chaux et ciments de Virieu-le-Grand, bien installé dans son
négoce, qui bénéficie d'une infrastructure commerciale avec ses dépôts à Lyon-Vaise
et Genève. Par cette convention signée le 27 octobre 1877, François Genet leur
garantit l'exclusivité de sa production pour un prix fixe convenu entre eux et
l'approvisionnement en combustible. Cela lui résout ses deux derniers problèmes
mais le met dans une dépendance totale vis-à-vis d'eux.
Il ne reste plus qu'à embaucher la main
d'œuvre nécessaire. Il lui faut des carriers pour extraire le calcaire de la
mine, des ouvriers pour remplir et vider les fours et conditionner la chaux,
des charretiers pour le transport du matériau brut et de la chaux en sacs. C'est
ainsi qu'il emploie neuf ouvriers[34], tous italiens.
Population éminemment flottante, même si nous connaissons leurs noms, ils ont
laissé fort peu de traces dans la vie de Virieu. Le charretier Baptiste
Locatelli, un des rares qui semble être resté, est né vers 1855 à Sedrina dans
la province de Bergame. Un autre ouvrier, Lorenzo Adobati, est aussi originaire
de la province de Bergame. Cette population italienne est alors très présente à
Virieu. En 1896, premier recensement dont on dispose, 175 habitants sur 1 148,
soit 15 %, sont étrangers, italiens dans leur très grande majorité. Enfin, à
défaut de bénéficier de l'aide de son frère, il s'adjoint les services de son
beau-frère Grégoire Pugieux. Pour donner un ordre de grandeur, les ouvriers
sont payés 120 francs par mois et son beau-frère, qui faisait peut-être office
de contremaître, gagne 230 francs par mois.
L'activité peut désormais démarrer. La
première livraison de chaux à Jurron, Delastre et Cie a lieu le 22
décembre 1877. Sa production totale de chaux légère sera de 1 263 tonnes
entre décembre 1877 et début septembre 1878. La moyenne hebdomadaire de
production est de 33 tonnes, avec une moyenne un peu inférieure de 28 tonnes jusqu'en
avril 1878, suivi d'une forte activité entre fin avril et début août, avec une moyenne
de 41,5 tonnes. Probablement à cause des difficultés dont on va parler, à
partir de la mi-août et jusqu'à la cessation d'activité, la moyenne a
continûment baissé jusqu'à 21 tonnes par semaine. Ses ouvriers, las de ne pas
être payés, ont probablement commencé à déserter le chantier.
Dans le même temps, la pression des
créanciers est toujours plus forte. Déjà dépendant de Jurron et Delastre pour
son activité de fabricant de chaux, via la convention signée, la relation va se
renforcer avec eux car leur arrangement inclut aussi la prise en charge par
Jurron et Delastre du paiement des créances dues par François Genet. Pour cela,
ceux-ci procèdent à une retenue de 1,5 francs par tonne de chaux. Ils sont
associés, voire acteurs (nous n'avons pas de documents suffisamment précis)
pour l'établissement d'un concordat[35] avec les créanciers de
François Genet. Des différents éléments que nous avons, nous en déduisons que cette démarche a été
mise en place à la fin 1877, lorsque les première retenues ont été appliquées
sur les livraisons de chaux. Les discussions sur la mise en place du concordat,
qui ont nécessité des déplacements de Jurron et Delastre évalués plus tard à
150 francs, doivent avoir eu lieu durant le premier semestre de 1878. Même si la
mise en place du concordat a échoué, en juillet 1878, Jurron et Delastre ont tout
de même versé 1 098 francs à Lyonnet & Cie, épicier en gros
à Lyon, près de 2 500 francs au notaire de Virieu, Me Jeantet,
qui est intervenu dans le projet de concordat, et quelques centaines de francs
à d'autres créanciers.
L'analyse des documents de gestion
fournis par Jurron et Delastre permet de conclure que l'équilibre économique de
l'activité de François Genet est très fragile. Pendant la durée de son
activité, les deux associés lui versent 10 171 francs en espèces, pour une
facturation estimée de 23 700 francs. La différence sert à couvrir les
frais de fournitures de combustible et d'avoine, ainsi que les paiements aux
créanciers pour un total de plus de 4 000 francs. En regard de ces 10 171
francs, les frais de personnel sur 9 mois sont estimés à 11 790 francs[36]. Autrement dit, toutes
les espèces versées par Jurron et Delastre sont utilisées pour le paiement des
ouvriers. A partir du moment où ils ne versent plus aucune somme à François
Genet, celui-ci n'a plus les liquidités nécessaires pour verser leurs salaires
à ses ouvriers. C'est probablement ce qui s'est passé en août 1878, après le
dernier versement en espèce. A partir de ce mois, les ouvriers ne sont plus
payés et leur action va précipiter la chute de François Genet. Avant de
poursuivre, on peut se demander pourquoi Jurron et Delastre décident à ce
moment-là de lui « couper les vivres », alors que l'activité semble
bien partie ? Peut-être parce que les créanciers se montrent de plus en
plus pressants ? Peut-être parce que l'échec du concordat montre que la
situation vis-à-vis des créanciers est sans issue ? Quel a été le rôle
exact de Jurron et Delastre, on ne le saura jamais, mais vu la dépendance de
François Genet à leur égard, ils tenaient son destin économique entre leurs
mains. A leur décharge, la situation paraissait difficilement tenable, avec une
activité qui ne générait quasiment pas de profit et une dette globale de plus
de 26 000 francs, soit plus que ce que François Genet a pu facturer en 10
mois d'activité. Enfin, Jurron et Delastre se sortent sans dommage de cet
arrangement, car François Genet ne leur doit pas d'argent après la cessation d'activité.
Le 9 septembre 1878, il livre sa
dernière marchandise. Les ouvriers, qui n'ont pas touché leurs salaires,
demandent leur dû par exploit d'huissier le 21 octobre 1878. La procédure de
déclaration de cessation de paiement et de faillite est engagée.
La
faillite
Suite à l'assignation des ouvriers, le
31 octobre 1878, le tribunal de Belley déclare François Genet, épicier et
fabricant de chaux, en état de faillite et nomme un juge-commissaire, Léon
Juvanon du Vachat[37], et un syndic, Marin
Legrand, greffier au tribunal de Belley. La machine judiciaire est lancée. De
procédure en procédure, elle va se dérouler sur un an. On peut suivre, acte
après acte, le parcours judiciaire de François Genet à travers les annonces légales
de la dernière page du Courrier de l'Ain[38], donnant une publicité à l'anéantissement des rêves et des espoirs
d'un homme qui a peut-être imaginé qu'il pouvait rejoindre le monde de cette
bourgeoise industrielle en plein essor qu'il voyait autour de lui à Virieu-le-Grand
et que sa surface financière, très certainement insuffisante, obligera à
revenir à la réalité et à la situation sociale de ses pères.
En décembre, François Genet fait un
point de sa situation devant le syndic de la faillite. Il estime son actif,
essentiellement immobilier, à 13 060 francs et le passif, représenté par
les dettes qu'il a auprès de 47 personnes ou sociétés, à 21 674 francs. Et
pourtant, le montant des dettes ne s'arrête pas là. Pendant plus de 10 jours,
du 11 janvier au 20 janvier 1879, défilent au tribunal de Belley, devant les
différents juges et François Genet lui-même, tous ceux qui souhaitent faire
valider leurs créances dans le cadre de la faillite. De nouveaux créanciers
viennent, d'autres ne se présentent pas. Ce sont 42 créanciers qui se
présentent pour un total de 19 417 francs. Si on ajoute ceux que François
Genet a identifiés et qui ne se sont pas présentés, on arrive à 69 créanciers,
pour un montant total des créances de 26 124 francs. Qui sont ces
créanciers ? Neuf d'entre eux sont des personnes du pays envers qui il a
des dettes : billets à ordre, solde de ventes de terrains, etc. Ensuite,
ce sont 14 artisans locaux à qui il doit souvent des petites sommes pour
services rendus ou fournitures : serrurier, charron, ferblantier, voiturier,
potier (Jean Louis Silbereissen, fabricant de poêles de faïence à Belley), etc.
Pour son activité d'épicier, il a des dettes vis-à-vis de 16 fournisseurs qui,
pour 14 d'entre eux, se trouvent à Lyon. Ils lui ont fourni de l'épicerie, de
la confiserie, de la mercerie, de la droguerie, de la quincaillerie, de la
toile, de la bonneterie, etc. Enfin, il doit des sommes souvent importantes à
12 fournisseurs directement liés à son activité de fabricant chaux, tant pour
la mise en place de la fabrication (entrepreneur, fabricant de briques
réfractaires, de matériels, etc.) que pour les consommations de son activité
(fournisseur de charbon, de sacs en toile de jute, etc.). Signe que cette
nouvelle activité lui a élargi son horizon, on les trouve géographiquement plus
dispersés, avec même un fournisseur installé à Picquigny dans la Somme, mais
aussi des fournisseurs à Genève, Saint-Etienne, Grenoble. Je ne reviens pas sur
les neuf ouvriers dont nous avons déjà parlé, ni des dettes qu'il a vis-à-vis
de son frère Claude et de son beau-frère Grégoire Pugieux, suite aux
prestations qui lui ont fournies. Pour finir cette litanie, je mets à part E.
Hyacinthe, fabricant de billards, 9-11, cours Bourbon à Lyon. François Genet
a-t-il acheté un billard pour son usage personnel ? Meuble un peu
surprenant quand on connaît ses origines, mais peut-être volonté de marquer sa
promotion sociale.
La procédure, inexorable, se poursuit
par la saisie de ses meubles et de ses biens immobiliers. Le dimanche 23 mars
1879, tout son mobilier est proposé aux enchères dans son domicile de Virieu-le-Grand :
« Vitrine et tiroirs de magasin, banques, bascules, balances, horloge,
vaisselle, batterie de cuisine, bonbonnes, futailles, cuves, chariot à quatre
roues, tombereau, brouettes, harnais, sacs vides, quantité d'articles de
mercerie et d'épicerie, etc., etc. »[39]. Ses biens immobiliers
sont vendus aux enchères devant le tribunal civil de Belley le 17 juillet 1879.
Cependant, avant de voir le résultat de cette vente, revenons rapidement sur la
situation de sa famille qui est, elle aussi, entraînée dans ce « feuilleton »
judiciaire.
Ses
deux enfants du premier mariage, Philibert et Marie Françoise, ont obtenu leur
émancipation en juillet 1878[40].
En ce même printemps 1879, ils demandent que l'on procède au partage des biens
communs entre leur père et leur mère décédée. Cela conduit à une deuxième vente
aux enchères, le 7 août 1879, trois
semaines après celle résultant de la faillite[41].
Entre autres biens, c'est la maison familiale qui est alors proposée aux
enchérisseurs. Enfin, dernier épisode avant la liquidation finale, Clotilde
Genet demande la séparation de biens. Elle l'obtient le 17 juin 1879. Même s'il
est difficile d'en déduire la nature exacte de la relation entre François Genet
et sa femme Clotilde, il faut probablement plus y voir un signe de confiance et
d'intérêt bien compris pour les deux. Ainsi en ces printemps et été 1879, se
joue la dernière partie de la « saga » de François Genet à
Virieu-le-Grand.
Lors de
la première vente aux enchères qui propose tous les immeubles en sept lots, Clotilde
Genet se porte acquéreur de quatre lots, pour la somme de 900 francs. On
comprend l'intérêt de la séparation de biens et la confiance mutuelle qu'il
devait y avoir entre eux[42].
Dans la seconde vente aux enchères, c'est le père de Clotilde, Jean Genet, qui
se porte acquéreur de tous les lots proposés, dont la maison familiale, pour 3 875
francs. N'y
a-t-il pas de la psychologie du joueur chez François Genet ? En effet, même «
lessivé », il espère toujours se « refaire » ! En achetant ces lots (Jean
Genet est probablement un prête-nom pour son gendre), il prend un engagement de
plus de 4 700 francs, somme énorme lorsque on sait qu'il doit déjà plus de
26 000 francs et que cette sommes viendra en surplus.
Est-ce
pour cela qu'un ancien notaire et un propriétaire de Virieu-le-Grand s'associent
pour surenchérir dès le 30 juillet sur les lots attribués à Clotilde Genet ? C'est
peut-être pousser loin l'hypothèse que de penser que les notables de
Virieu-le-Grand ne souhaitent plus voir « sévir » François Genet dans la région
après avoir laissé tant de dettes. Lors de la liquidation finale de la faillite
en 1882, seuls 192 francs seront distribués aux créanciers pour un passif total
de 19 506 francs.
Autrement dit, les créanciers n'ont recouvré que 1 % de leurs créances ! Cela
peut laisser quelques ressentiments. Le rêve de François et Clotilde Genet de
rester à Virieu s'évanouit. Ils abandonnent le combat. Lors de la vente sur
surenchère le 13 septembre 1879, Clotilde Genet ne tente pas de suivre. Dans le
même temps, Jean Genet s'empresse de trouver un acquéreur pour les lots qui lui
ont été attribués. Il les vend à Antoine Gojoz, cordonnier de Virieu, le 17
septembre 1879[43].
En cette fin septembre 1879, plus rien ne lie François et Clotilde Genet à
Virieu-le-Grand, hors leurs familles respectives. Une nouvelle vie commence,
plus précaire.
Lyon
Après
cet été 1879, François Genet et sa famille s'installent à Lyon. Pourquoi Lyon ?
Comme on l'a vu Belley et sa région, dont fait partie Virieu, sont dans la zone
d'influence économique de Lyon. François Genet lui-même a depuis longtemps des
relations d'affaires à Lyon. C'est une ville qu'il connaît bien. On sait que dans
la propre famille de François et Clotilde Genet, Lyon est une destination
privilégiée. Du côté de François, on y trouve son oncle Jean Genet, menuisier à
Lyon, sa sœur Julie, cuisinière, qui s'y marie, une autre sœur, Louise,
domestique, qui y est morte ; du côté de Clotilde, sa sœur Julie, épouse de Grégoire
Pugieux. De plus, sans argent, ni plus aucun bien, Lyon offre à la famille la
possibilité de trouver un travail et un logement. Qu'ont-ils fait à Lyon entre
1880 et 1889, les dates extrêmes, de leur présence attestée dans la ville ? On
leur connaît deux adresses[44].
La première est le 255, rue Sainte-Elisabeth (actuellement Garibaldi), à l'angle
du 111, cours des Brosses (actuellement cours Gambetta) (dates
extrêmes connues : 1er juin 1880 - 12 février 1883). A une
exception près, il est qualifié soit de restaurateur, soit de débitant de
boissons. On peut penser qu'en venant à Lyon, il a voulu renouer pour partie
avec son activité de commerçant. Dans le Guide
indicateur de la ville de Lyon, année 1881, il apparaît sous l'intitulé : « Genet,
Buvette »[45]. La deuxième adresse est le 42, rue Ney, dans le 6e
arrondissement (dates extrêmes connues : 1886 - 18 juillet 1888)[46].
Il est en général qualifié d'employé de commerce, mais aussi de manœuvre et
même une fois plus précisément d'employé à la compagnie des eaux de Lyon[47].
Quant à Clotilde, elle est généralement qualifiée de couturière, sauf en 1880
où elle est « restaurateur » comme son mari.
Lors de
ce séjour de 10 ans à Lyon, naissent deux enfants supplémentaires : Léon Henri,
le 1er juin 1880, qui ne vit que 2 mois et Camille Gabrielle, le 18
juillet 1888, la mère de Jean Genet.
Avant
de voir le destin parallèle des enfants de François Genet, notons que malgré
leur difficile situation financière, le couple n'est pas complétement démuni.
En quelques mois de l'année 1887, ils héritent chacun de quelques terres et d'une
portion de maison à Virieu-le-Grand et Cuzieu. C'est d'abord Jean Genet Peland
qui partage ses biens entre ses 3 enfants, en mars 1887[48],
avant de mourir quelques semaines plus tard. Clotilde récupère quelques
parcelles et un hangar. Elle revend immédiatement ce dernier pour 500 francs[49].
Quelques mois après, suite au décès de Pierrette Laperrière, les frères et
sœurs Genet se partagent les biens de leurs parents[50].
François récupère une portion de la maison familiale, qu'il partage avec son
frère Claude, et quelques parcelles. Là aussi, dès janvier 1888, il revend la
totalité de ce qui lui est échu à son beau-frère Claude Gros pour 600 francs.[51]
Il coupe ainsi les derniers liens avec son pays natal.
Philibert et Marie Genet
Philibert
a-t-il suivi son père et sa belle-mère à Lyon ? On ne sait pas. Lors de la conscription
de la classe 1879, il est employé de commerce à l'« Epicerie parisienne »,
à Roanne. Incorporé le 15 novembre 1880 au 6e régiment d'artillerie
à Valence, il n'y passe qu'un an, avant d'être versé dans la
disponibilité en octobre 1881. Grâce à cela, on dispose de son signalement : Cheveux
et sourcils : châtains, yeux : châtains, front : large, nez : fort, bouche
: moyenne, menton : rond, visage : ovale, taille : 1 m. 72, marques particulières : néant[52].
Pendant ce temps, sa sœur Marie[53],
avec qui il sera toujours très lié jusqu'à la fin de leurs vies, habite chez
son père et sa belle-mère à Lyon au 255, rue Saint-Elisabeth. Elle est
demoiselle de magasin. Le 31 décembre 1880, le frère et la sœur reçoivent le
solde de la vente des biens de la communauté entre leur père et leur mère
décédée[54]. Les 3 242 francs qu'ils
se partagent ont dû représenter une belle somme pour débuter dans la vie[55]. Est-ce pour cela qu'ils
souhaitent tenter leur chance à Paris ? On ne le sait, mais ils habitent
tous les deux à Paris en février 1883. Il est employé à l'économat du chemin de
fer de l'Ouest, à Paris, aux Batignolles et vit près de là au 163, avenue de
Clichy (17e). Sa sœur Marie est employée de commerce et vit au 19,
rue Notre-Dame de Lorette (9e). A cette date, ils liquident quelques
biens qu'ils ont hérités de leurs grands-parents Philibert Pilloux et Françoise
Ducros[56]. Ainsi, le lien avec
Virieu-le-Grand se distend de plus en plus.
Cette même année 1883, Philibert Genet
reconnaît une fille née de sa relation hors mariage avec Anne Marie Pourrat[57] : Marie Alice, née à
Paris 17e le 22 juillet 1883 et morte quelques semaines plus tard le
6 septembre, au 63, rue Pouchet. Quelle vie ont-ils ensuite menée pendant ces
années sans être mariés ? Nous ne savons pas. Ils régularisent la situation le
11 janvier 1887 par leur mariage à la mairie du 17e. Ils vivent
alors au 121, rue des Dames, après avoir vécu au 6, rue Brochant[58], toujours dans le 17e
arrondissement. Les parents des mariés ne sont pas présents. François Genet a
donné son accord devant un notaire de Lyon. Il est intéressant de se pencher
sur la liste des témoins du mariage :
- Pierre François Debrabant, 46 ans, négociant en couleurs, Paris, 40, rue de Belleville, ami de l'époux
- Maurice Martin, 23 ans, artiste dessinateur, Paris, 18, rue de Passy, ami de l'époux
- Charles de Frondat, 40 ans, employé d'administration, Paris, 17, rue Dautancourt, ami de l'épouse
- Emile Gosse de Serlay, 28 ans, employé d'administration, Paris, 43, rue Truffaut, ami de l'épouse
- Pierre François Debrabant, 46 ans, négociant en couleurs, Paris, 40, rue de Belleville, ami de l'époux
- Maurice Martin, 23 ans, artiste dessinateur, Paris, 18, rue de Passy, ami de l'époux
- Charles de Frondat, 40 ans, employé d'administration, Paris, 17, rue Dautancourt, ami de l'épouse
- Emile Gosse de Serlay, 28 ans, employé d'administration, Paris, 43, rue Truffaut, ami de l'épouse
A première vue rien de particulier.
Mais détaillons, car c'est riche d'enseignements sur le milieu que fréquentent
les enfants Genet.
Emile Gosse de Serlay est le rejeton d'une
bonne famille française[59]. Un de ses cousins est le
général de brigade Raymond Gosse, baron de Serlay (1834-1905). Pierre François Debrabant
est un marchand de couleurs, d'abord installé avenue de Clichy, puis à
Belleville[60].
En 1883, il est déjà le témoin de la naissance de Marie Alice. Est-ce lui qui a
introduit les enfants Genet dans le milieu artiste ? En effet, les 2 autres
témoins en font partie. Le premier, moins connu, est Charles de Frondat qui s'est
fait une petite réputation de caricaturiste. A la fin de l'Empire et au début
de la IIIe République, il a inondé les journaux de portraits-charges
des notabilités politiques, qu'il a ensuite rassemblés en recueils[61]. Enfin Maurice Martin est
tout simplement Martin Van Maele, qui est surtout connu pour ses illustrations
érotiques, produites entre 1905 et 1926. Il est considéré comme un des plus
grands représentants de cette spécialité au début du XXe siècle. Nous
allons vite avoir l'occasion d'en reparler car son destin est intimement lié à celui
de la famille Genet.
Le couple, parti du quartier populaire
du nord du 17e arrondissement, a peu à peu migré vers les beaux
quartiers, signe probable d'une amélioration de leur situation économique. Dans
les divers actes où il apparaît, Philibert est qualifié d'économe ou de
comptable. Ils habitent au 112, rue Lafontaine (16e) lorsque naît
Alice Marguerite Genet, le 7 mars 1888. C'est encore Maurice Martin qui est
témoin à cette naissance. Remarquons qu'Alice Genet est née quatre mois avant
sa tante Camille Genet.
Quelques mois plus tard, le lien se
renforce encore plus lorsque Maurice François Alfred Martin, artiste-peintre,
domicilié à Paris, 3, rue Galilée, né à Boulogne-sur-Seine le 12 octobre 1863,
fils de Louis Alfred Martin, professeur de gravure à l'Ecole de Genève et
Virginie Mathilde Jeanne Van Maele, épouse Marie Françoise Genet, le 19 février
1889, à la mairie du 16e arrondissement. Les parents ne sont pas
présents. François Genet a donné son consentement presque un an auparavant, le
9 mars 1888, alors que les parents de Maurice Martin ne l'ont fait qu'un mois
avant. Etaient-ils réticents pour qu'ils tardent tant alors que le mariage
était visiblement prévu depuis presque un an[62] ? Parmi les témoins, on
trouve évidemment Philibert Genet, qui accompagne sa sœur, Arthur Chandler, un
marin de Dunkerque, fils illégitime d'un avocat anglais, ainsi que deux
artistes, Emile Brin[63], artiste peintre, et
Jules Jouant[64],
sculpteur. Il ne naîtra pas d'enfant de ce mariage.
En même temps qu'Emile Brin, Maurice
Martin expose pour la première fois lors du salon des Artistes français en mai
1888, dans la section Dessins, cartons,
etc. Ce sont deux œuvres : Une
forge au Caucase et Convoi de
Circassiens[65].
On apprend ainsi qu'il est l'élève de Daniel Vierge[66] et qu'il est domicilié au
15, rue de Passy. Dans ce même salon et cette même section, Mme Alice Martin de
Voos, née à Virieux-le-Grand, domiciliée au 15, rue de Passy, expose un
dessin : Les mouettes, lac de Genève.
Un faisceau de présomptions nous laisse penser qu'il s'agit de Marie Françoise
Genet[67]. Elle est aussi l'élève
de Daniel Vierge, mais aussi de Belcroix. A-t-elle persévéré dans cette
carrière d'artiste ? On ne le sait. On ne la retrouve pas dans les salons
suivants, ni dans les autres salons où son mari a exposé. Faut-il l'identifier
avec Mme de Voos dont quelques dessins gravés ont illustré des articles du Monde illustré, revue où ont longtemps officié
son beau-père Albert Martin, probablement son mari Maurice Martin et son
professeur Daniel Vierge[68] ?
Peut-être suite à ce mariage, en mars
1889, le frère et la sœur vendent le dernier bien qui les attache à
Virieu-le-Grand : la maison de leurs grands-parents[69]. On apprend ainsi que les
jeunes mariés habitent désormais au 26, rue Saint-Placide dans le 6e
arrondissement dans un quartier où ils resteront jusqu'à ce qu'ils quittent
Paris.
Paris
En 1890, un troisième enfant Genet vit
à Paris, Gabriel, serrurier, probablement hébergé par sa demi-sœur et son
beau-frère rue Saint-Placide. Le 29 janvier 1890, il se rend au bureau de
recrutement de Paris 6e pour s'engager dans l'armée pour 5 ans. Il a
19 ans. Incorporé dans le 4e, puis dans le 8e régiment d'Infanterie
de Marine, il parcourt le monde, au gré des campagnes coloniales, en
particulier à la Réunion. Il est libéré en janvier 1893 au bout de 3 ans[70].
Cette même année 1890 (ou peut-être dès
1889), François Genet et Clotilde Genet viennent vivre à Paris. Trois des cinq
enfants y vivent déjà. Plus rien ne les retient à Lyon. François Genet est peut-être
déjà malade. En effet, le 14 juin 1892, il est admis pour fièvre à l'hôpital
Beaujon, alors situé dans Paris au 208, rue du Faubourg-Saint-Honoré. Le 7
juillet, il meurt dans la salle Sandras, au lit 28. On lui diagnostique un
cancer de l'estomac[71]. Lors de la conscription
de leurs fils Gabriel, en 1890, François Genet et sa femme Clotilde vivent 6, rue
Lebouteux, dans le 17e, probablement dans un des garnis du bâtiment sur
cour. Au moment de son décès, leur adresse est le 3, rue Jacob, dans le 6e.
Les recherches montrent que c'est là que vivent Maurice Martin et Marie
Françoise Genet entre 1891 et 1898[72]. Ainsi, pendant quelques
temps, le couple Genet est hébergé par leurs enfants. Leurs filles Léontine et
Camille sont probablement avec eux. Le 3, rue Jacob est aussi la première
adresse de Gabriel Genet à son retour de l'armée début 1893.
Lorsqu'il meurt en ce jour de juillet
1892, François Genet n'a que 61 ans. Il laisse une jeune veuve de 46 ans,
Clotilde, qui a repris son métier de couturière, et trois grands enfants,
Philibert, l'aîné, 33 ans, son épouse et leur fille Alice, Marie Françoise, 29
ans, et son mari Maurice Martin, à Paris, au 3, rue Jacob et Gabriel, qui va
avoir 22 ans, soldat dans l'infanterie de marine à la Réunion. Il laisse aussi deux
jeunes filles, Léontine, 15 ans, et Camille, 4 ans.
Pendant quelques années, la vie de la
famille va se poursuivre à Paris. En avril 1895, Gabriel Genet habite au 1, rue
Mayet dans le 6e, probablement avec sa mère et ses 2 sœurs. Le 18 avril
1896, il épouse Gabrielle Camille Durozé à la mairie de Montreuil dans la
proche banlieue de Paris. Elle-même couturière, fille d'Auguste Durozé,
mécanicien, et Clotilde Verron, elle est née dans le 20e arrondissement
le 30 septembre 1874. On retrouve le milieu des artistes parisiens avec son
frère Fernand Durozé, né le 16 janvier 1876, qui a eu une certaine notoriété
comme peintre[73].
Gabriel est lui-même accompagné de son beau-frère Maurice Martin et du
sculpteur Jules Jouant. Maurice Martin est resté proche du demi-frère de sa sœur.
Il est probable que c'est lui qui a donné son prénom au premier fils du jeune
couple, Maurice Fernand, né à Montreuil en 1897. En 1900, il est aussi témoin
pour le décès de leur fille Yvonne Alice.
Gabriel Genet et Gabrielle Durozé ont
eu cinq enfants, tous nés à Montreuil :
- Maurice Fernand, né le 25 janvier 1897
- Germaine Clotilde, née le 24 août 1898
- Yvonne Alice, née le 4 mars 1900, morte à Paris 6e le 28 septembre 1900
- Suzanne Fernande, née le 14 octobre 1901
- Odette Camille, née le 23 septembre 1903
- Maurice Fernand, né le 25 janvier 1897
- Germaine Clotilde, née le 24 août 1898
- Yvonne Alice, née le 4 mars 1900, morte à Paris 6e le 28 septembre 1900
- Suzanne Fernande, née le 14 octobre 1901
- Odette Camille, née le 23 septembre 1903
Après avoir eu quelques adresses
parisiennes, selon un nomadisme qui semble courant parmi les locataires
parisiens (1, rue Mayet (6e), avec sa mère en avril 1895 et 1896,
17-19, rue Pierre Leroux (7e) en janvier 1897 et août 1897, 40, rue
Mazarine (6e) en septembre 1900), le couple s'installe
définitivement à Montreuil, à partir de 1901, dans la rue des Messiers, à
quelques numéros des parents de Gabrielle. A partir de ce moment, le destin de
cette famille est lié à Montreuil.
Lors de ces mêmes années, en 1898,
Philibert Genet part vivre à Lyon. Pourquoi ? Avec quel objectif ? Je n'ai
trouvé aucun élément permettant de donner une explication. Il est visiblement
venu à Lyon pour se lancer dans des affaires industrielles, reproduisant à 30
années de distance la même ambition que son père. En avril 1898, il habite au
16, cours Charlemagne, à Lyon, derrière la gare de Perrache, mais il est déjà
répertorié comme fabricant de carton bitumé pour toitures légères au 1, quai de
la Vitriolerie[74]
de l'autre côté du Rhône. Vers 1905, il achète un ensemble de terrains dans le
quartier de Gerland, à l'angle de l'avenue Leclerc et de la rue des Girondins,
une rue créée justement en 1907 sur les terrains délaissés par le fort de la
Vitriolerie, dans le 7e arrondissement actuel de Lyon. Il y fait
construire une maison d'habitation, ainsi que des entrepôts et bâtiments
industriels, contribuant ainsi à l'urbanisation du quartier[75].
Philibert Genet perd sa femme le 22
mars 1910. Elle meurt dans la maison de la rue des Girondins.
Après la rue Jacob,
Maurice Martin et Marie François Genet habitent au 5, rue Suger (dates extrêmes
connues : 28 septembre 1900 – 27 janvier 1903). Probablement pour s'éloigner
de Paris et trouver un pied à terre où Maurice Martin puisse se consacrer
entièrement à son œuvre d'illustrateur spécialisé dans les ouvrages érotiques,
ils commencent à s'implanter à Varennes-Jarcy, une petite commune de l'Essonne
qui était devenue la villégiature des Parisiens[76].
Il peut y croiser l'écrivain Henri Pagat[77],
le graveur Oscar Roty[78],
le peintre et graveur Louis Morin[79].
En mai 1902, ils achètent un bois d'une vingtaine d'ares, près de la rivière d'Yerres[80].
Enfin, en juin 1904, ils complètent par une petite parcelle de 40 m2
au bord de l'Yerres, dans le prolongement du bois, puis le même jour, ils signent
un bail pour une belle maison à Varennes, route de Mandres[81].
Leur installation devient définitive.
Avant son décès en
1904, la dernière trace que nous avons de Clotilde Genet est le jour où elle
vend les dernières parcelles qu'elle possède à Virieu-le-Grand. Par deux actes
sous seing privé, datés du 2 août 1898, elle les cède pour la modeste somme de
100 francs[82].
Elle habite alors au 1, rue Rousselet dans le 7e arrondissement. Quelques
mois plus tard, à cette même adresse, sa fille Léontine Genet meurt le 28
octobre 1898, à 21 ans. Elle est alors domestique. L'immeuble d'habitation du 1
de la rue Rousselet, qui fait l'angle avec la rue Oudinot est un modeste bâtiment
de 2 étages qui contient 11 logements, tous d'une seule pièce, certains étant
même qualifiés de cabinet[83].
C'est ainsi que l'on imagine Clotilde Genet vivant avec ses deux filles
Léontine et Camille dans une pièce unique. Quelques années auparavant, François
Coppée avait évoqué cette rue. Il habitait en face, au numéro 12 de la rue
Oudinot : « Quand je vins habiter le coin perdu du faubourg
Saint-Germain, où je vis depuis une dizaine d'années, je me pris d'affection
pour la très calme et presque champêtre rue Rousselet, qui s'ouvre juste devant
la porte de ma maison. […] Un hôtel du siècle dernier, situé au coin de la rue
Oudinot, est devenu l'hôpital des Frères Saint-Jean-de-Dieu, et les arbres de
leur beau jardin dépassent le vieux mur effrité qui occupe presque tout le côté
droit de la rue Rousselet. De l'autre côté s'étend une rangée d'assez pauvres
maisons, où logent des artisans et des petits employés, et qui toutes jouissent
de la vue du jardin des Frères. La rue Rousselet est très mal pavée, le luxe du
trottoir n'y apparaît que par tronçons ; l'une des dernières, elle a vu
disparaître l'antique réverbère à potence et à poulie. Peu de boutiques, et des
plus humbles : l'échoppe du cordonnier en vieux, le trou noir de 1'Auvergnat
marchand de charbon, le cabaret d'angle avec l'enseigne classique : Au bon coing, et de tristes épiceries où
vieillissent dans un bocal des sucres d'orge fondus par vingt étés et gelés par
vingt hivers, à côté d'images d'Épinal, – une page de hussards dans leur
uniforme de 1840, ou le portrait authentique et violemment peinturluré du Juif
Errant, encadré des couplets de la célèbre complainte. – Des linges sèchent aux
fenêtres, des poules picorent dans le ruisseau. On se croirait là dans un
faubourg de province très reculée, un de ces faubourgs qui s'en vont vers la
campagne et où la ville redevient village. »[84]
Peut-être chassée de la rue Rousselet
par la construction d'un nouvel immeuble à l'emplacement du modeste et
probablement insalubre bâtiment où elle habitait, elle se déplace d'une
centaine de mètres pour habiter au 66 rue de Sévres, qui, comme la rue
Rousselet, abritait encore une population modeste. C'est ici qu'elle vit lorsqu'elle
est admise à l'hôpital Notre-Dame de Bon-Secours[85]. Elle y décède le 27
septembre 1904, âgée de 58 ans. Dans son acte de décès, elle est qualifiée
d'épicière. On peut penser que dans les dernières années de sa vie, elle est
revenue exercer ce métier qu'elle connaissait, probablement dans une épicerie
du quartier de la rue de Sèvres. Cela expliquerait qu'elle ait toujours cherché
à habiter dans une des rues de ce quartier : rue Mayet, rue Pierre-Leroux, rue
Rousselet et enfin rue de Sèvres.
Au décès de sa mère, Camille Genet a
alors 16 ans. Qu'est-elle devenue après ce décès, jusqu'à ce qu'on la retrouve
6 ans plus tard à l'automne 1910 ? Comme elle est mineure, il y a
nécessairement un conseil de famille qui a statué soit sur son émancipation,
soit sur la nomination d'un tuteur. Qui peut avoir été son tuteur ? Un de ses
frères Gabriel ou Philibert, son beau-frère Maurice Martin ? Cela donnerait un
éclairage intéressant sur ses jeunes années de formation et peut-être sur sa
situation en 1911. Ce que l'on sait est qu'elle n'est recensée dans aucun des 3
ménages de sa famille restante, soit à Montreuil, soit à Varennes-Jarcy, soit à
Lyon. Il est fort probable qu'elle a été placée très jeune pour subvenir à ses
besoins et ne pas être à la charge de sa famille.
La
famille Genet en 1911
Le 19 décembre 1910, Camille Genet
accouche à l'hôpital Tarnier (6e) d'un garçon qu'elle prénomme Jean.
Obligée de le mettre en nourrice à Santeuil, en Seine-et-Oise, elle fait appel
dès février 1911 à l'aide de l'assistance publique. Lors de l'enquête qui fait
suite à cette lettre (25 février 1911), il apparaît qu'elle n'a plus ses
parents et qu'elle réside dans le département de la Seine depuis « six mois ».
Elle habite à l'hôtel depuis la même période. Elle renouvelle sa demande en mars
1911. Elle pousse alors ce cri de détresse :
« Je suis seule, absolument seule,
j'avais un ami qui m'a laissée seule et n'étant pas le père de mon enfant je ne
peux rien lui demander. Il me reste en poche 3 f. et quelques sous. »[86]
Que s'est-il donc passé dans la famille
Genet pour qu'elle se retrouve dans une telle situation, alors que nous venons
de le voir, elle avait une famille qui, peut-être, aurait pu l'aider ? En
1911, après avoir vécu quelques années regroupée à Paris, la famille Genet se
trouve dispersée. On verra que cela n'empêchera pas les 3 enfants, Philibert,
Marie François et Gabriel de garder des relations jusqu'à leurs décès. Ces
liens, même entre enfants de deux lits différents, ne semblent pas avoir inclus
la petite dernière, Camille. Pourquoi ? La différence d'âge[87] ? D'autres événements que
le temps a ensevelis ?
Au moment où Camille Genet doit
abandonner son fils, en ce printemps 1911, Philibert, le frère aîné, récemment
veuf, vit avec sa fille Alice, la contemporaine de Camille, dans leur nouvelle maison
de la rue des Girondins[88]. Sans parler de fortune, ce
petit industriel doit vivre avec une certaine aisance, dont on trouvera la
preuve quelques années plus tard lors de son décès. Ensuite, Marie Françoise
vit avec son mari et sa belle-mère à Varennes-Jarcy[89]. En ces années-là, c'est
la période de plus grande activité créatrice pour Martin Van Maele dans le
genre qui l'a rendu célèbre. Précisément en 1911, paraît La Sorcière, de Jules Michet, chez Jules Chevrel à Paris, illustré
de 15 eaux-fortes. Il travaille aussi à l'illustration de dix contes d'Edgar
Allan Poe, qui paraîtront l'année suivante, à la Librairie Dorbon-Ainé, avec 95
compositions originales. Nous n'avons pas d'indication de fortune, mais on peut
imaginer que l'abondance de sa production dans ces années-là lui apporte une
certaine aisance. Enfin, le plus jeune frère, Gabriel, et sa femme vivent à
Montreuil, dans le quartier ouvrier de la rue des Messiers, près de ses beaux-parents
– Gabriel semble avoir été proche de sa belle-famille – avec leurs quatre enfants[90]. Toujours qualifié d'employé,
il semble n'avoir jamais accédé à un minimum d'aisance.
Si on étend notre recherche au-delà de
ce premier cercle familial, en cette année 1911, Camille Genet a encore de la
famille proche, des oncles, tantes et cousins germains.
Du côté de son père, la famille s'est
dispersée et cela très tôt. La fille aînée Julie, épouse Louis Gros, est morte
depuis très longtemps, mais c'est la seule branche restée au pays. De ce côté-là,
Camille Genet a des cousins germains à Cuzieu et dans les villages
environnants. Ensuite, Jean-Louis, le maçon et tailleur de pierre, a eu une vie
errante. On trouve sa trace à Oron-le-Château, en Suisse, où il se marie
(1863), à Paris (1867), Alet dans l'Aude (1877), Vollien (1885), Belley (1887-1890)
et enfin Grenoble où il se fixe[91]. Il a eu une descendance
dans cette région. L'autre frère, Claude, celui qui s'était associé avec
François Genet, a aussi eu une vie errante, au gré des chantiers de chemin de
fer semble-t-il. Aussi présent à Oron-le-Château, en 1863, où il se marie, on
le trouve ensuite à Châteaudun (1864), Virieu-le-Grand, lorsqu'il s'associe à
son frère (1877), Trets dans les Bouches-du-Rhône (1878-1879), Champvert dans
la Nièvre (1882), Vitry-le-François (1886, 1887) et enfin Saint-Pierre-Quilbignon
(actuellement Brest) où il meurt le 11 février 1895. De ce côté-là, une
ascension sociale dont nous ne connaissons pas la cause, permet à Léontine
Genet, sa fille et cousine germaine de Camille, d'épouser Jean Gestin, fils du
médecin et ancien maire de Saint-Pierre-Quilbignon[92]. A la génération
suivante, Jeanne Gestin, donc une cousine-issue-de-germaine de Jean Genet,
épouse en 1943 le rejeton d'une famille notable française, Hubert de Margerie,
saisissant contraste des destinées personnelles dans l'échelle sociale.
Enfin, la dernière sœur de François
Genet, Julie, a disparu de Lyon. Son destin est inconnu. Il est probable que de
ce côté-là, la dispersion familiale est ancienne[93] et a peut-être été
aggravée par des brouilles. Claude Genet, qui a perdu des milliers de francs
dans la faillite de son frère, n'a pas dû garder des relations chaleureuses
avec cette branche de la famille ! Camille Genet n'a probablement aucun recours
de ce côté-là, si tant est qu'elle connaisse même cette famille.
Du côté de sa mère, le frère aîné,
Claude, en cette année 1911, est toujours charpentier à Virieu-le-Grand, comme
son père, dans la maison paternelle. De son mariage avec Euphrasie Orset, il a
quatre enfants, tous contemporains de Camille : Jeannette, née en 1879, Maria,
née en 1882, Anthelme, né en 1885 et Henri, né en 1891[94]. L'oncle Claude Genet meurt
en décembre 1915. Le fils Henri est mort à la guerre de 14, au Chemin des Dames,
le 9 août 1917. Son nom est gravé sur le monument au mort de Virieu-le-Grand.
Enfin, la sœur cadette de Clotilde, Marie Josephte Genet, épouse de Grégoire
Pugieux, est morte à Villeurbanne le 30 octobre 1890, suivie par son mari, mort
à l'hospice Sainte-Eugénie de Saint-Genis-Laval en 1901. Ils ne laissent rien
en mourant. Leur fils unique, Claude Pugieux, né en 1875, le cousin germain de
Camille, vit probablement à Paris en 1911 (il y est mort à l'hôpital
Saint-Louis en octobre 1960). Peut-être que là aussi, les relations s'était
distendues. De la même façon, Grégoire Pugieux a perdu quelques centaines de
francs dans la faillite de son beau-frère.
La
famille éclatée
Reprenons le fil de la vie des 3
enfants Genet.
Nous suivons la vie de Philibert Genet
à travers l'état civil et les recensements de Lyon. Après la guerre de 14
(1921) on le trouve comme industriel, fabricant de fusibles électriques, toujours
installé rue des Girondins à Lyon[95]. Il vit d'abord seul avec
sa fille. En 1926, sa fille absente, il est alors aidé d'une gouvernante. Cette
même année 1926, Maurice Martin meurt à Varennes-Jarcy le 5 septembre. Malgré
la distance, Philibert Genet est présent comme témoin lors de l'enregistrement
du décès. Comme dans le recensement de la même année, il est qualifié de
rentier. Belle réussite qui lui permet, sur le déclin de ses jours, de pouvoir
vivre de ses rentes. Il a ainsi réalisé ce qui était peut-être l'ambition de
son père.
Au moment de son décès, Maurice Martin
ne laisse rien, si ce n'est quelques meubles[96]. Sa veuve, Marie Genet,
après s'être mise d'accord avec sa belle-mère, toujours vivante malgré ses 85 ans,
vient rejoindre son frère Philibert et sa nièce Alice dans leur petite maison
de la rue des Girondins à Lyon, signe du lien fort qui a toujours existé entre
le frère et la sœur.
Alice Genet, restée célibataire, meurt
le 6 juin 1931, dans la maison de son père, à l'âge de 53 ans. Dans son
testament, elle lègue tous ses biens à son père[97]. Peu d'années plus tard,
le 5 mai 1935, c'est au tour de Philibert Genet de s'éteindre, à 76 ans. Dans
son testament rédigé quelques mois avant, le 6 février, il lègue l'ensemble de
ses biens à sa sœur, lui assurant ainsi une sécurité financière pour ses
dernières années[98].
La déclaration de succession de Philibert Genet fournit une bonne « photo » de
sa réussite[99].
La part la plus importante de son patrimoine est constituée d'un « tènement d'immeuble
Lyon 29 avenue Leclerc et rue des Girondins, n° 2, 4, 6, 8 et 10, comprenant
maisons d'habitation et hangars, bâtiments industriels en mauvais état, avec
autre petite maison d'habitation d'un rez-de-chaussée construite en dalles, et
terrain. Superficie : 3 900 m2. » L'ensemble est estimé 360 000
francs. Il loue ces bâtiments à différentes personnes pour un loyer annuel de 24 000
francs. Il possède aussi du mobilier, une automobile Peugeot 301, un compte en
banque, différentes actions et obligations, pour un total d'un peu moins de
13 000 francs. Au total, son avoir au moment de son décès est de 397 000
francs et surtout, il bénéfice d'un revenu régulier[100]. Dernier signe qu'il est
vraiment passé du côté des « possédants », il a eu l'occasion de souscrire une
assurance pour gens de maison !
Marie Françoise Genet, veuve Maurice
Martin, meurt quelques années plus tard, à la veille de la guerre, le 23
juillet 1939, quelques jours après ses 78 ans. Avec elle s'éteint le dernier
enfant de François Genet. N'ayant elle-même pas d'héritiers, elle lègue l'ensemble
de ses biens à ses deux neveux survivants, tout du moins aux deux qu'elle
connaît, Maurice et Germaine Genet, les enfants de son demi-frère Gabriel,
preuve s'il en est que les liens familiaux étaient restés assez forts malgré la
dispersion des enfants. L'ensemble des immeubles de la rue des Girondins est
alors vendu en mars 1940 et les meubles sont dispersés aux enchères par Me
Vabre, commissaire-priseur à Lyon, le 10 avril 1940[101].
Pour finir cette histoire de la famille
Genet, revenons au dernier fils Gabriel Genet. Lui aussi, nous le suivons à
travers les recensements et l'état civil de Montreuil. Il est toujours qualifié
d'employé. Nous savons qu'en 1917, il est employé de la banque Guers, qu'au
moment de son décès, il est qualifié d'employé de bourse. En 1921, il travaille
pour la banque Rosenblith. Cette activité ne l'a pas enrichi, ni même permis de
se créer un petit patrimoine, car il ne laisse aucun bien après son décès. Il a
toujours habité Montreuil, d'abord dans la rue des Messiers, jusqu'au décès de
son épouse Gabrielle Durozé le 14 décembre 1928, puis au 32, boulevard Chanzy
où lui-même meurt le 23 avril 1932 à 61 ans. De ses 4 enfants, Odette,
cuisinière, meurt le 6 janvier 1928 à l'âge de 25 ans, puis Suzanne,
couturière, le 3 avril 1933 à l'hôpital Saint-Antoine (Paris 12e). C'est
ainsi qu'en 1939, il ne reste plus que deux enfants survivants comme héritiers
de Marie Françoise Genet : Maurice et Germaine. Celle-ci est toujours
qualifiée de couturière. Elle travaille dans un atelier de confection
appartenant à l'entreprise A. Poncet, 40 & 42, rue d'Avron, devenue les Établissements
Poncet & Milon, puis Milon, Thélot & Cie, 42, rue d'Avron. Elle est
morte à son domicile du 32, boulevard de Chanzy le 20 février 1960. Son frère,
dernier enfant survivant, est aussi le seul qui s'est marié, en 1922, avec
Berthe Doby, une corsetière. Habitant au 51, rue Kleber[102], toujours à Montreuil,
ils n'ont pas eu d'enfants. Maurice Genet est photographe. Il a en particulier
été employé dans les années 1930 par le photographe industriel Boldo[103]. Après le décès de sa
femme le 10 décembre 1965, il est recueilli par la Maison de Nanterre, ancien
dépôt de mendicité, qui était alors un hospice réservé aux vieillards
indigents. Il y meurt le 13 mars 1968, dernier enfant survivant de Gabriel
Genet et dernier descendant de François Genet, hormis bien entendu Jean Genet.
Conclusion
Au terme de ce travail, que je vois
plus comme une esquisse d'histoire familiale, je constate qu'il y a encore
beaucoup d'éléments à trouver. Le premier, et le plus important, est la vie de
Camille Genet entre le décès de sa mère en 1904 et la naissance de Jean Genet
en 1910. Cela permettrait d'éclairer sa situation personnelle en cette année
1910 où elle a rencontré le père de Jean Genet. Parmi les autres pistes à
explorer, une histoire biographique plus complète de Martin Van Maele
apporterait des informations intéressantes sur ce petit réseau de
connaissances/amis dans le milieu artiste du Paris de la fin de siècle, auquel
appartenaient au moins trois des enfants Genet. Une autre piste serait de
situer plus précisément l'histoire sociale de la famille Genet, dans une
histoire plus globale de la société paysanne de la région de Belley. Cela
permettrait de répondre à la question : dans leur histoire familiale, qu'est ce
qui est imputable à l'histoire collective de ces petites propriétaires cultivateurs
(« la fin des terroirs ») et qu'est ce qui est imputable à leur propre destin
personnel ?
Je suis conscient de la limite intrinsèque
de ce travail. Après avoir soulevé un pan du voile sur la vie de la mère de
Jean Genet, qu'est-ce que cela nous apporte réellement sur Jean Genet lui-même,
sa personnalité, sa trajectoire personnelle ? Je laisse le soin à chacun de
répondre, car cela présuppose d'attribuer ou non, selon ses convictions, une
importance au poids de l'histoire familiale sur le destin de chacun, même pour
un enfant qui a eu fort peu de contact avec sa mère, pour avoir été rapidement
mis en nourrice, puis abandonné.
Je voudrais finir par quelques
réflexions plus personnelles sur le sens que je donne à cette étude. Passionné
par l'œuvre de Jean Genet, historien familial par hobby, la lecture de la
dernière grande étude sur « Jean Genet avant Genet » m'a inspiré pour relever
le défi d'en savoir plus et de passer cette barrière dans le temps qui
paraissait infranchissable. Un peu de réflexion sur les pistes de recherche,
une bonne connaissance des sources d'histoire familiale disponibles sur
internet et dans les dépôts d'archives m'ont ensuite permis de trouver en moins
d'une heure l'acte qui sera la clé qui ouvre la porte de l'oubli : le décès de
François Genet à l'hôpital Beaujon ce jour de juillet 1892. Après, c'est
beaucoup de travail, des heures à compulser les état-civils parisiens,
lyonnais, etc., des déplacements aux Archives départementales, un
voyage-pèlerinage à Virieu-le-Grand sur la trace de la famille Genet, c'est l'exploration
de tous les autres documents qui permettent d'enrichir cette histoire familiale
afin d'arriver à un récit dans lequel, au-delà des faits bruts, un peu de matière et donc un peu de vie
peuvent se glisser.
A titre personnel, cela a été aussi l'occasion
d'une appropriation plus forte d'un auteur qui, par certaines de ses œuvres, a
une importance plus particulière pour moi. Avant de rendre publiques mes
découvertes, je me suis interrogé. Est-il légitime de mettre à découvert toute
une histoire que l'intéressé lui-même a totalement ignorée ? Je pense que oui,
mais je comprendrais que l'on juge cela comme une forme de viol de l'intimité d'un
homme. Est-il opportun de briser cette image d'un homme presque sorti de nulle
part en l'insérant dans une histoire familiale ? Est-ce que je ne casse pas une
légende, presque un mythe, celle d'un écrivain fils de ses propres œuvres ? Je
suis conscient que rattacher Jean Genet à l'histoire somme toute banale d'une
famille de petits paysans de l'Ain qui tentent, comme beaucoup de leurs
contemporains, de s'agréger à une petite bourgeoisie provinciale, pourrait
faire se dissiper un enchantement qui donne une dimension supplémentaire à l'homme
et écrivain Jean Genet. J'en suis d'autant plus conscient que, sans diminuer
mon mérite, ouvrir la clef de cette histoire familiale ne demandait qu'un
effort limité, comme s'il y avait un tabou qui pesait sur ses origines et
empêchait d'autres chercheurs d'entreprendre de lever le voile. Je l'ai fait,
je vous laisse juge.
[1] Jean Genet,
matricule 192.102. Chronique des années 1910-1944., Albert Dichy et Pascal
Fouché, Paris, Gallimard, 2010.
[2] Jean Genet, Edmund White, Paris,
Gallimard, 1993, pp. 15-16.
[3] Sur le site de généalogie Geneanet, il existe plus de 3000 occurrences
de François Genet.
[4] Dans cet article, toutes les informations d’état civil
: dates de naissance, mariage, décès, lieux, personnes concernées et témoins
sont extraites de l’état-civil des communes concernées, accessibles depuis
Internet, en particulier pour l’Ain, Lyon, Paris et autres communes. Pour ne
pas alourdir, nous ne donnerons pas systématiquement les références. Seules les
dates issues d’autres sources seront référencées. Les abréviations ADA, ADE,
ADF, ADO, ADR et ADSSD correspondent respectivement aux Archives
départementales de l’Ain, de l’Essonne, du Finistère, de l’Oise, du Rhône et de
Seine-Saint-Denis. AP correspond aux Archives de Paris.
[5] Une bonne synthèse sur Virieu-le-Grand est Virieu-le-Grand, Louis Trénard, 1985.
Pour aller plus loin : Le canton de Virieu-le-Grand, géographie
administrative, par J. Corcelle in Bulletin de la Société de Géographie
de l’Ain, n°2, 1889 et les articles du Dictionnaire
du département de l’Ain, de J. Pommerol et E. Philipon, 1907. Pour une
évocation contemporaine de Virieu-le-Grand, on peut consulter : De Lyon
à Seyssel. Guide historique et pittoresque du voyageur en chemin de fer.
Promenade dans l’Ain, par un Dauphinois, [Emmanuel de Quinsonas], Lyon,
1858 et Les vallées du Bugey : excursions historiques, pittoresques et
artistiques dans le Bugey, la Bresse, la Savoie & le pays de Gex, par le Baron Achille Raverat, Lyon,
1867. Enfin, pour une étude plus détaillée : Le Bas-Bugey, la Terre et les
Hommes, par Gabrielle et Louis Trénard, Belley, 1951. A notre connaissance,
il n’existe aucune monographie historique sur Cuzieu.
[6] Statistique
générale de la France. Département de l’Ain, Joseph-Aurèle de Bossi, 1808,
pp. 149-150.
[7] Raverat, 1867 : p. 247-249. Signalons que le
Bas-Bugey est la région natale de Jean-Anthelme Brillat-Savarin (Belley 1755 –
Paris 1826), un des plus illustres gastronomes français qui a publié sa Physiologie du goût en 1825, ouvrage
nourri, si l’on ose dire, de ses expériences du pays natal.
[8] Journal du voleur, édition
folio, pp. 48-49.
[9] Il est inhumé à Bons le 26 novembre 1752. Il est alors
fermier des religieuses de Bons.
[10] Courrier de l’Ain,
n° 94, 59e année, 14 juillet 1879, p. 2 : « Assises de l’Ain.
Ouverture de la 2e session de l’année de la cour d’assises de l’Ain. »
[11] Anthelme Genet est mort à son domicile de Vollien le
28 août 1881.
[12] Pierrette Laperrière est morte accidentellement à La Rochette sur la
commune de Chazey-Bons le 21 mars 1887. Un entrefilet dans le Courrier de l’Ain
(n° 37, 26 mars 1887, p. 3) relate les circonstances : « Une pauvre
femme, Annette X..., âgée de 84 ans et habitant Volliens, canton de
Virieu-le-Grand, revenait de Bons où elle avait acheté quelques provisions.
Son fils qui l’avait
quitté en route pour aller préparer la maison et faire le feu, fut bientôt
inquiet. Il se remit en marche et retourna du côté de Bons. Ne l’ayant pas
aperçu sur la grande route, il s’informa aussitôt. Des personnes qui passaient
lui indiquèrent où ils avaient rencontré une femme dont le signalement
correspondait à celui de sa mère.
Il suivit ce chemin, et,
quelques instants après, il se trouva en présence du cadavre de sa mère.
Celle-ci s’était égarée malheureusement et, ayant fait un faux pas, avait roulé
dans un précipice.
La gendarmerie a fait
une enquête et, d’après son rapport, tout idée de crime ou de suicide doit être
écartée. » Malgré l’erreur sur le prénom et l’âge, il n’y a pas de doutes
qu’il s’agisse d’elle.
[13] Sur ce sujet, on peut lire la très intéressante étude
sur le « nourrissage » des enfants de la Charité de Lyon, dans Histoire du Valromey, d’Hélène et Paul
Perceveaux, pp. 429-436 (Virieu-le-Grand est tout proche de cette petite région
du Bas-Bugey). On y apprend que, mise en place au XVIIIe siècle,
cette organisation a eu son maximum d’ampleur entre 1820 et 1840. La première
année, une famille nourricière touchait une gratification de 72 francs, somme
qui va ensuite en décroissant jusqu’à la douzième année.
[14] Vente par Jean Michaud, propriétaire, Vollien par acte
devant Me Jurron, notaire, Virieu-le-Grand, 9 avril 1855 (n° 99) (ADA
3E20216)
[15] Les Saint-Pierre sont une famille notable de
Virieu-le-Grand, issue de Robert Saint-Pierre (1748-1819), de Reims, installé à
Virieu comme huissier avant la Révolution. En 1855, il existe deux branches,
celle de Joseph, huissier, mort en 1854, représentée par son fils Marin, aussi
huissier, et celle de Jean, boulanger, mort en 1855, représentée par Joseph,
cultivateur. C’est dans une de ces familles qu’il a servi.
[16] La parcelle inclut un « grangeon ». Comme le
dit le Baron Raverat : « On appelle grangeons de simples petites maisonnettes
bâties à l’endroit le plus favorable de la vigne. Dans les plus grands, se
trouvent pressoirs, cuves, tonneaux et tout l’attirail de l’exploitation. Dans
les autres, le vigneron réunit sa famille et ses amis. […]
Tout
Bugiste a son grangeon, de même que tout Marseillais a sa bastide ; […]. Dès qu’un ouvrier a amassé quelques économies,
vite il achète un petit coin sur la colline, l’entoure d’un mur de pierres
sèches, le défriche, y plante quelques ceps, se sert pour le fumer du crottin qu’il n’a pas honte de ramasser
lui-même sur la grande route ; et voilà un homme heureux, et voilà aussi un
grangeon de plus. A la possession d’un grangeon, se bornent les vœux et l’ambition
d’un Bugiste ; avant de l’avoir, c’est son rêve de chaque instant. L’a-t-il
enfin, c’est son bonheur, sa vie ; il lui consacre tous ses loisirs ; il y
vient chaque jour. » op. cit.,
pp. 74-75.
[17] L’orthographe est fluctuante : Pillou, Pilloux,
Pilloud. Le père de Philibert Pilloux, aussi prénommé Philibert, est un enfant
de l’hôpital général de la Charité de Lyon, né en 1762, et placé en nourrice à
Virieu-le-Grand. Il y a fait souche.
[18] Contrat de mariage devant Me Jurron, notaire, Virieu-le-Grand, 26 décembre 1857 (n° 207)
(ADA 3E20218). Marie Louise Pilloux sait signer.
[19] Vente par Claudine Bal, épouse de Louis Marin Livet,
propriétaire, cultivateur, Rossillon, par acte devant Me Jurron,
notaire, Virieu-le-Grand, 4 février 1860 (n° 18) (ADA 3E20221).
[20] Transport de leurs droits successifs par Louise et
Annette Bal, de Virieu-le-Grand, par acte devant Me Jurron, notaire,
Virieu-le-Grand, 30 avril 1863 (n° 36) (ADA 3E20224).
[21] Le tronçon Ambérieu-Seyssel, de la ligne de chemin de
fer Lyon-Genève, est inauguré le 7 mai 1857. Virieu-le-Grand est une gare
importante, permettant de desservir ensuite le sud du département et Belley. La
prolongation vers Genève entre en exploitation le 16 mars 1858. Cela met
Virieu-le-Grand à 85 km de Lyon et 70 km de Genève. C’est un facteur important
de prospérité pour le bourg. (Source : Histoire
du Valromey, d’Hélène et Paul Perceveaux, pp. 449)
[22] Description en 1879 : « Une maison d’habitation,
située à Virieu-le-Grand, quartier du Coter, bâtie en pierres et maçonnerie,
ayant cave, magasin et arrière-magasin, au rez-de-chaussée et un étage
au-dessus, avec toit à deux pentes, recouvert en tuiles plates.
La façade principale sur
la route, par laquelle on pénètre dans la maison, a au rez-de-chaussée une
ouverture pour la porte du magasin avec une enseigne sur le mur « Genet,
épicier » et une fenêtre au premier étage, fermant avec volets peints en gris.
La façade sur rivière,
au couchant, a une grande ouverture au rez-de-chaussée et une au premier étage.
»
Cette description correspond
aux images que l’on en a sur les cartes postales du début du XXe
siècle. Seule l’enseigne a changé avec le nouveau propriétaire.
Les granges qui
l’entourent seront aussi transformées, l’une en café et l’autre en une maison
avec commerce (charcuterie).
[23] La première mention connue est le 15 décembre 1866. La maison a été
construite vers 1865, car elle apparaît sous cette nouvelle dénomination
fiscale dans le cadastre en 1867 (il y a toujours un décalage d’à peu-près deux
ans).
[24] Un autre grand écrivain a eu des grands-parents
épiciers. Louis Proust (1801-1855) et son épouse Virginie Torcheux (1808-1889),
les grands-parents de Marcel Proust, ont tenu une épicerie de village à Illiers
(Eure-et-Loir), première étape de l’ascension sociale de la famille.
[25] Cette prospérité se traduit dans l’évolution de la
population. Partant d’un niveau de 800 personnes dans les années 1830-1840, la
population croît régulièrement jusqu’à un maximum de 1 207 en 1901. La
population amorce ensuite un lent déclin jusqu’à un palier bas de 845 en 1954.
Depuis, la population a repris sa croissance.
[26] Jean Genet Peland (Virieu-le-Grand 7 novembre 1812 - Virieu-le-Grand
10 mai 1887) est le fils de François Genet et Marguerite Billet. Jeanne Vettard
(Virieu-le-Grand 9 février 1813 - Virieu-le-Grand 14 novembre 1896) est la fille de Louis
Vettard, cultivateur à Virieu-le-Grand et de Denise Manjot. Ils se marient à
Virieu-le-Grand le 21 février 1843. Au moment de leur mariage, lui n’apporte
que ses « linges et vêtements » et « les outils de sa profession »
et elle apporte : « 1° une armoire ou garde-robe en bois noyer à deux
portes, 2° une chaîne à col à deux rangs avec croix, le tout en or, 3° une
somme de 450 frcs en argent comptant. » (Contrat de mariage Me
Jurron, notaire, Virieu-le-Grand, 30 janvier 1843 – ADA 3E20076)
[27] Contrat de mariage devant Me Brochard,
notaire, Virieu-le-Grand, 11 mai 1867 (n° 58) (ADA 3E20227).
[28] Il n’existe pas d’étude historique sur l’industrie de
la chaux à Virieu-le-Grand. Les deux sources sont les ouvrages cités plus
hauts sur l’histoire de Virieu-le-Grand et une étude très complète de Raoul
Blanchard : L’industrie des chaux et ciments dans le Sud-Est de la France. in: Revue
de géographie alpine. 1928, Tome 16, n°2. pp. 255-376.
[29] Les deux associés sont Louis Jurron et Philippe Delastre. Louis Jurron
(Virieu-le-Grand 28 mars 1850 - Virieu-le-Grand 28 décembre 1909) est le fils
d’Eugène Jurron, géomètre forestier puis notaire à Virieu, qui a initié la
fabrication de la chaux dans la commune en 1864. Il est aussi le neveu d’un
autre notaire Joseph Antoine Jurron. Philippe Delastre (Neuville-sur-Saône 18
janvier 1847 – après 1914) est le beau-frère de Louis Jurron, par son mariage
avec Clotilde Jurron, mais aussi son cousin-germain. Son père, Hercule
Delastre, est le pionnier de la fabrication de la chaux à Virieu dès 1855. Son
grand-père, Joseph Delastre, a aussi été notaire à Virieu. Pour finir, leur
beau-frère commun, Albert Lourdel, époux de Lucile Jurron, prendra la suite de
l’activité. La prospérité des familles Jurron et Delastre au début du XIXe
siècle trouve sa source dans la double activité du négoce en région lyonnaise
et du notariat à Virieu. C’est un bel exemple de stratégie familiale, avec la
stratégie matrimoniale associée, à mettre en regard de la situation de François
Genet.
[30] Outres les différents actes notariés, la source la
plus complète est le dossier de faillite, constitué au tribunal de Belley et
consultable dans le fonds judiciaire des Archives départementales de
l’Ain : « Faillite de François Genet, marchand épicier et fabricant
de chaux, Virieu-le-Grand », n° 179 (ADA 3U1166).
[31] Acte de vente devant Me Henry Guyon,
notaire, Virieu-le-Grand, 27 janvier 1877 (n° 21) (ADA 3E20325). Vente par Jeanne
Gouge, assistée et autorisée de M. Antoine Manjot, propriétaire,
Virieu-le-Grand à François Genet, propriétaire et épicier, Virieu-le-Grand
d’une parcelle de pré à Virieu-le-Grand, à prendre au midi de plus grande
pièce, au Cuchon, 6 ares 64 centiares pour le prix de 863,20 francs, dont 50
sont payés comptant et le reste selon un échéancier sur un an.
[32] Vente par Jean Surgère et Mme Adèle Guillermet, son
épouse, tous les deux propriétaires, Virieu-le-Grand par acte devant Me
Henry Guyon, notaire, Virieu-le-Grand, 6 août 1877 (n° 177) (ADA 3E20325).
[33] Hasard du calendrier ou volonté de compenser le
préjudice subi par Claude Genet, leur mère Pierrette Laperrière fait justement
son testament le 30 août 1877 devant Me Convers, notaire, Seyssel,
(n° 11325) (ADA 3E14089) dans lequel elle favorise nettement Claude en lui
donnant le quart de tous ses biens, en plus de la part qui lui revient, avec
faculté de prendre les biens de son choix (après le décès de Pierrette
Laperrière, le partage a lieu devant Me Nicod, notaire,
Virieu-le-Grand, 9 mai 1887 (n° 62) (ADA3E20343))
[34] C’est la situation en septembre 1878, au moment de la
cessation de l’activité. Nous n’avons pas le détail durant toute la durée de l’exploitation.
[35] Un concordat est un accord passé entre le débiteur et
ses créanciers au terme duquel les créanciers accordent des délais de paiements
ou des remises de dettes à leur débiteur afin d’éviter la cessation des
paiements ou l’ouverture d’une procédure collective.
[36] Estimation sur la base du nombre d’ouvriers présents en
septembre 1878 et d’une durée d’activité de 9 mois, de décembre 1877 à août
1878.
[37] Descendant d’une ancienne famille du Bas-Bugey, Léon
Anthelme Juvanon du Vachat (Arandas (Ain) 19 février 1832 – Lyon 1er
11 novembre 1910) est un petit-neveu du socialiste utopiste Charles Fourier,
par sa grand-mère maternelle Sophie Fourier (1771-1843), épouse de Philibert
Parrat-Brillat. Charles Fourier a passé 5 ans de sa vie dans le Bugey, auprès
de ses nièces Rubat et de sa sœur, entre 1816 et 1821, soit à Talissieu, soit à
Belley. C’est durant cette période qu’il compose son Traité de l’association domestique-agricole. Il en a rapporté un
vision très sombre de la « vertueuse campagne » où il a vécu :
« J’ai vu dans un hameau de 40 feux où j’étais allé habiter pour
travailler à ce livre, j’ai vu, dis-je, dans ce prétendu asile de l’innocence
champêtre, des orgies secrètes aussi bien organisées que dans une grande ville,
des demoiselles de vingt ans plus exercées, plus rouées que ne pouvaient l’être
à quarante ans Laïs et Phryné ; des paysannes habituées à voir déflorer leurs
filles à l’âge de dix ans, des pères et mères bien informés de tout ce manège
et y donnant les mains aussi froidement que les mères de Otahiti se prêtaient à
la prostitution de leurs filles. Tout ce dévergondage était bien fardé de
bégueulerie, de communions et de sacrilèges. Voilà ce qu’on peut voir partout
comme je l’ai vu dans ce hameau. » Il rapporte aussi : « J’allais
demeurer dans une vertueuse campagne, asile de l’innocence, et j’y appris par
gens très dignes de foi qu’il n’y avait pas une jolie paysanne qui fût vierge à
dix ans partout depuis que les militaires en retraite abondent dans les
campagnes. » Talissieu se trouve à moins de 10 km au nord-est de
Virieu-le-Grand. (Source : Fourier,
Jonathan Beecher, 1993, chapitre VII : « Les vertueuses campagnes », pp. 161-178).
[38] Entre le 2 novembre 1878, annonce de la faillite de
François Genet, et le 8 juillet 1879, ce sont 11 annonces légales qui sont
publiées en dernière page du journal. La collection numérisée est consultable
sur le site des Archives départementales de l’Ain.
[39] Annonce publiée dans le Courrier
de l’Ain, n° 44, 20 mars 1879, p. 4.
[40] Emancipation le 30 juillet 1878 devant Joseph Vachon,
juge de paix de Virieu-le-Grand (Justice de paix de Virieu-le-Grand, 1878-1880
(ADA 4U4059), acte n° 101, 30 juillet 1878). Philibert a 19 ans et Marie
Françoise 17 ans. Cette émancipation précède la faillite de quelques mois. Est-ce
que leur père, pressentant les difficultés à venir, a voulu leur donner leur
liberté, pour ne pas les entraîner dans sa chute, en préservant leurs droits
sur la part de son patrimoine issu de la communauté avec sa première
épouse, leur mère ? Elle a aussi lieu deux semaines après le décès de leur
grand-père, dont ils sont les seuls héritiers.
[41] Vente par licitation le 7 août 1879 selon jugement du
tribunal de Belley du 9 mai 1879.
[42] Les autres lots sont achetés
par ses anciens vendeurs Antoine Manjot et Jean Surgère. La terre que Jean
Surgère lui avait vendue 3 000 francs, est rachetée par celui-ci 500 francs alors
qu’elle est désormais exploitée comme carrière. De même, Antoine Manjot rachète
la parcelle pour le prix auquel il la lui a vendue, mais elle porte désormais
deux fours à chaux. La faillite de François Genet n’a pas fait que des perdants !
Les fours à chaux seront démolis vers 1887. La carrière a continué à être
exploitée. L’emplacement en est encore visible, envahi par la végétation et les
détritus (elle sert visiblement de décharge sauvage !).
[43] Vente devant Me
Ecochard, notaire, Belley, 17 septembre 1879 (n° 616) (ADA3E8659). Antoine
Gojoz exploite l’épicerie jusqu’à son décès en 1899. C’est sa fille unique
Louise Gojoz, épouse Louis Clerc, cultivateur, qui prend la suite.
[44] Pour être complet, dans le dossier militaire de
Philibert Genet (classe 1879), il est indiqué une adresse pour son père qui, malgré
une difficulté de lecture, semble être le 116, rue Sainte-Elisabeth à Lyon.
Comme il doit s’agir de son domicile au moment des 20 ans de Philibert, soit en
1879, on peut penser qu’il s’agit du tout premier domicile de la famille à
Lyon. L’immeuble appartenait à un pâté de maisons situé à l’emplacement de la
place des Martyrs de la Résistance.
[45] Labaume. Guide
indicateur de la ville de Lyon et du département du Rhône. 21e année.
1881. Il apparaît deux fois. Dans la section Rue de
Lyon avec tenants et aboutissants, il est
répertorié au 255, rue Sainte-Elisabeth (p. 322) : « Genet,
buvette », avec « Robert, épic. » et « Vallat, taill. de
limes ». Il apparaît ensuite dans la Nomenclature alphabétique des
principaux habitants de la ville de Lyon (p. 541) : « Genet,
buvette, Ste-Elisabeth, 255 ». C’est
grâce à cet Indicateur que l’on sait
que les numéros 255 de la rue Sainte-Elisabeth (Garibaldi) et 111 du cours des
Brosses (Gambetta) correspondent à un même immeuble à l’angle de ces deux
voies. Le quartier a été profondément urbanisé depuis cette date et les
numérotations des rues sont différentes.
[46] L’immeuble existe toujours à la même adresse dans le 6e
arrondissement de Lyon.
[47] La famille est recensée deux fois à Lyon. En 1881, au
255, rue Sainte-Elisabeth : François Genet, 51 ans, débitant, chef de
famille, Clotilde Genet, 36 ans, mère, et les 3 enfants : Gabriel Genet,
11 ans, Léontine Genet, 4 ans et Françoise Genet, 20 ans. En 1886, au 42, rue
Ney : François Genet, 55 ans, manœuvre, chef de famille, Clotilde Genet,
40 ans, couturière, femme, Gabriel Genet, 16 ans, serrurier, fils et Léontine
Genet, 9 ans, sans profession, fille. (Recensement en ligne sur le site des
Archives départementales du Rhône).
[48] Donation-partage devant Me Nicod, notaire,
Virieu-le-Grand, 23 mars 1887 (n° 37) (ADA 3E2343). La maison familiale échoit
à Claude Genet, le fils, aussi charpentier, qui assure ainsi la continuité de
la famille à Virieu-le-Grand. Pour ce partage, François Genet est présent à
Virieu avec son épouse Clotilde Genet. Ce partage a lieu le lendemain du jour
où l’on a retrouvé le cadavre accidenté de la mère de François Genet.
[49] Vente à Hippolyte Verchère, propriétaire,
Virieu-le-Grand, devant Me Nicod, notaire, Virieu-le-Grand, 24 mars
1887 (n° 38) (ADA 3E2343).
[50] Partage devant Me Nicod, notaire,
Virieu-le-Grand, 9 mai 1887 (n° 62) (ADA 3E20343). Pour ce partage, il a donné
une procuration. La plus grande partie des biens échoit à Claude Genet, en
accord avec le testament de sa mère.
[51] Vente devant Me Nicod, notaire,
Virieu-le-Grand, 24 janvier 1888 (n° 7) (ADA 3E20345). Pour signer cet acte, François
Genet a fait le déplacement à Virieu-le-Grand, dernière présence attestée dans
son pays natal.
[52] Registre de matricules Lyon Bureau Central : matricule
1041 (1RP803). Cette fiche de matricule donne ensuite des informations
précieuses sur les différentes adresses de Philibert Genet, jusqu’à sa
libération définitive du service militaire en 1905 (consultable sur le site des
ADR).
[53] Il y a une incertitude sur le prénom d’usage. La
première signature connue de Marie Françoise Genet ne fait apparaître que
Françoise (décembre 1880). C’est aussi le seul prénom utilisé dans le
recensement de 1881 ou dans la mutation après décès de sa grand-mère (1876),
comme si Françoise était le prénom de la première partie de sa vie jusqu’à son
départ pour Paris. Lors de son mariage, elle signe M. F., ainsi que dans
plusieurs actes de cette époque. Ensuite, dans le recensement de 1906, elle est
prénommée Marie Alice, puis dans les recensements de 1911 à 1936, le prénom est
toujours Marie, comme dans sa signature sur un acte de 1904. J’ai donc retenu
ce prénom comme prénom d’usage. Nous verrons plus loin qu’elle a peut-être
adopté le prénom d’Alice seul à un moment donné.
[54] Quittance à
Antoine César Gojoz, maître bottier, Virieu-le-Grand devant Me Charrousset, notaire, Belley, 31/12/1880 (n° 330) (ADA
3E 08461). Jules Philibert Genet est alors soldat au 6e
régiment d’artillerie, en garnison à Valence et Marie Françoise Genet,
demoiselle de magasin, à Lyon, 111, cours des Brosses.
[55] Comme on le voit, la faillite de François Genet a tout de même préservé les
intérêts des deux enfants du premier lit. Les enfants du deuxième mariage n’ont
pas eu cette chance.
[56] Françoise Ducros meurt à Virieu-le-Grand
13 novembre 1876 à l’âge de 79 ans, suivie par son mari Philibert Pilloux, charron
à Virieu-le-Grand, le 19 juillet 1878 à l’âge de 82 ans. Le dimanche 6 mai
1883, l’entier contenu de la maison de leurs grands-parents est vendu aux
enchères (Me Nicod, notaire,
Virieu-le-Grand, 6 mai 1883 (n° 59) (ADA 3E20336)) pour la somme totale de 269 francs,
puis le 24 juin 1883, ils vendent deux parcelles pour le prix de 1 200 francs.
(Me Nicod, notaire, Virieu-le-Grand, 24/6/1883 (n° 76) (ADA 3E20336)).
Ils ne conservent que la maison des grands-parents.
[57] Anne Marie Pourrat, née à Saint-Jean-Soleymieux
(Loire) le 22 mai 1858, fille de Mathieu Pourrat, sabotier à
Saint-Bonnet-le-Château (Loire) et d’Anne Marie Chabany.
[58] Sans lien aucun, mais on peut signaler que c’est dans
ce même immeuble qu’est née la chanteuse Barbara en 1930.
[59] Nous l’avons identifié comme étant Charles Emile Gosse
de Serlay, né à Gy (Haute-Saône) le 14 octobre 1857, fils d’Oscar Gosse de
Serlay, ancien notaire et propriétaire, d’une famille de l’Artois, parmi
laquelle on trouve un conseiller du Roi, trésorier des États d’Artois, échevin
de la ville de Saint-Omer. On perd sa trace après 1892. Il est alors commis
auxiliaire temporaire à la mairie du 11e. Nous ne sommes pas les
seuls à avoir perdu sa trace car une annonce dans Le Petit Parisien, du
4 mai 1909 (n° 11875) lance un avis de recherche pour le retrouver, afin de
procéder à la liquidation de la succession de sa mère.
[60] Pierre François Debrabant (Saulieu 5 avril 1838 - Hôpital
Tenon (Paris 20e) 15 mars 1894), a débuté à Paris comme épicier,
avant de s’établir marchand de couleurs, d’abord au 83, avenue de Clichy
(1883), puis au 40, rue de Belleville (1887, 1894). Il est issu d’un milieu de
propriétaires et négociants.
[61] Notice dans Les mœurs et la caricature en France,
de John Grand-Carteret, 1888 (p. 642) : « Frondat
(Napoléon-Charles-Louis de). Né à Paris en février 1846. Employé dans une des
mairies de Paris, de Frondat n’apparaît qu’au moment de la guerre de 1870. Le
nombre des pièces publiées par lui, – tant feuilles détachées que suites – est considérable.
A fondé la Puce en colère, et a collaboré depuis au Sifflet, à la
Nouvelle Lune, au Grelot, sous divers pseudonymes. » On peut
consulter : La caricature politique en France pendant la guerre, le
siège de Paris et la Commune (1870-1871), Jean Berleux [Maurice Quentin-Bauchart],
1890. Dans l’avant-propos (p. XI), il le présente : « Frondas, dont
la production fut énorme, n[‘est] pas sans mérite mais verse[nt] trop souvent
dans la quasi obscénité. » Il répertorie les dessins dont certains sont
signés FC et Juvénal (pp. 63-71) et les recueils : Marrons sculptés,
Paris garde nationale, Paris incendié et La Puce en colère,
de 4 numéros (voir liste récapitulative p. 195).
[62] Maurice Martin et Marie Françoise Genet semblent avoir
vécu ensemble avant de se marier. Au moment du mariage, ils ont la même adresse
au 3, rue de Galilée. Auparavant, ils ont une adresse commune au 15, rue de
Passy. Philibert Genet et Anne Marie Pourrat étaient dans la même situation aux
trois adresses qu’on leur connaît avant leur mariage : 63, rue Pouchet (1883),
6, rue Brochant et 121, rue des Dames, lorsqu’ils se marient en 1887.
[63] Emile Léon Quentin Brin (Paris (17e) 2 juin 1863 - Paris (17e)
31 juillet 1950), est un peintre connu sous le nom de Quentin-Brin. Artiste
prolifique, il est l’auteur de très nombreux nus féminins à l’érotisme un peu
vaporeux. Il semble avoir fait de la femme son sujet de prédilection. Il expose
pour la première fois en 1888 au Salon des Artistes français, puis au Salon des
indépendants et au Salon d’Automne. Il expose régulièrement à la Société
nationale des Beaux-Arts et au Salon d’Hiver jusqu’à son décès. Il est fait chevalier
de la Légion d’honneur le 15 juillet 1949. Son dossier, consultable sur la base
Leonore, fournit de nombreux renseignements sur sa carrière.
Pour l’anecdote, son père
Arthur, avec son frère jumeau Quentin, ont été condamnés en 1866 pour
« délit d’outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs, en vendant et
distribuant des photographies obscènes. ».
[64] Auguste Jules
Alphonse Jouant, né à Paris le 19 juin 1863, est un sculpteur français.
Notice Wikipédia : « Jules Jouant est un sculpteur français qui
produisit essentiellement des œuvres de style art nouveau. Il a travaillé avec
Auguste Rodin. Il fit de remarquables bustes de Richard Wagner, Frédéric Chopin
et Ludwig van Beethoven, et de nombreuses statues. Il a également produit de
petits objets, comme des vide-poches, des coupe-papier, des clochettes de
table, mais également des vases, urnes, lampes, et plafonniers typiques du
style art nouveau, avec ses formes végétales. » Lors de son mariage à
Paris (16e) le 20 octobre 1896, ses témoins sont Maurice Martin et
un autre sculpteur, Auguste Ledru.
[65] Explication des ouvrages de peinture et dessins, sculpture,
architecture et gravure des artistes vivants exposés au Palais des
Champs-Elysées. Le 1er mai 1888,
1888, p.
270.
[66] Daniel Urrabieta Ortiz y Vierge dit Daniel Vierge (Madrid 5
mars 1851 - Boulogne-sur-Seine 10 mai 1904) est un illustrateur, peintre,
dessinateur et aquarelliste d’origine espagnol. En 1870, à l’invitation de
Charles Yriarte, il travaille pour Le
Monde illustré, dont il devient avec Edmond Morin l’un des illustrateurs
vedettes. En 1874 il s’oriente vers l’illustration de livres : Victor Hugo,
Chateaubriand, Jules Michelet, Francisco de Quevedo y Villegas, etc. (Source :
Wikipédia et Daniel Vierge, sa vie, son
œuvre, par Jules Adolphe de Marthold, 1906). Belcroix n’a pas été
identifié.
[67] Le prénom Alice est peut-être celui qu’elle s’est choisie en
vivant à Paris. On le voit mentionner une fois dans le recensement de Varennes
Jarcy en 1906 sous la forme Marie Alice. Autre présomption, ses deux nièces,
filles de son frère Philibert, ont porté le prénom d’Alice. Comme on l’a vu, le
prénom usuel a ensuite été Marie. Autre indice, on sait qu’avant son mariage
officiel en février 1889, elle était domiciliée au 15, rue de Passy, comme
Maurice Martin. Enfin, elle souhaite peut-être se qualifier de Mme Martin car
elle doit alors vivre maritalement avec Maurice Martin et projette de se marier,
son père lui ayant déjà donné son autorisation depuis mars de cette année-là.
Ils devront attendre quelques mois l’autorisation des parents de Maurice pour
officialiser. Martin de Voos serait le pseudonyme qu’elle a choisi pour se
différencier de son mari. Il fait probablement référence au peintre maniériste
flamand Martin de Voos, généralement orthographié Marten (ou Maarten) de Vos,
né à Anvers vers 1532, mort en 1603.
[68] Les fêtes d’Heidelberg.
– La grande tonne de 284,000 bouteilles dans les caves du château. (Composition
et dessin de Mme De Voos), dans Le Monde illustré, n° 1533, 14 août 1886 ou
La semaine sainte à Rome. – Le grand
pénitencier à Saint-Jean de Latran. (Dessin de Mme de Voos) dans Le
Monde illustré, n° 1879, 1er avril 1893. On trouve aussi des livres
illustrés : Au pays des farfadets, par S. de Cantelou, Paris, 1891, illustré
de 40 dessins par Martin de Voos, Mondaine, par Hector Malot, Paris,
1891, etc.
En 1907, paraissait à Paris et Londres La trilogie érotique de Paul Verlaine
(Amies, Femmes, Hombres) avec « quinze compositions originales
dessinées et gravées à l’eau-forte par Van Troizem ». En général, on
attribue le pseudonyme de Van Troizem au seul Martin Van Maele. Il faut
peut-être entendre « Trois M », comme Maurice Martin Van Maele. Peut-on
aussi l’entendre comme Maurice et Marie Martin ? S’agirait-il d’un
pseudonyme pour un travail à 4 mains ? Il serait étrange de penser que la
propre tante de Jean Genet a illustré les Œuvres
libres de Verlaine, dont le célèbre Hombres.
[69] Vente à Joseph Michaud, cultivateur, Virieu-le-Grand
pour 1 000 F devant Me
Nicod, notaire, Virieu-le-Grand, 12 mars 1889 (n° 38) (ADA 3E20346)
[70] Registre de matricules 6e bureau de
Paris (AP D4R1 639) : matricule 3671. Sa description : Cheveux et sourcils : châtains, yeux : châtains, front : large, nez : ordinaire, bouche : moyenne,
menton : rond, visage : ovale, taille : 1 m. 66, marques
particulières : néant.
Signalons au passage que Maurice Martin a été exempté de service militaire pour
« faiblesse générale » (Liste du tirage au sort, Paris 16e
: AP D1R1 448)
[71] Archives de l’APHP, registre des entrées 1892 (1 Q
2/133) et registre des décès Beaujon (Paris) 3Q2/63.
[72] Les calepins du cadastre de Paris sont une source
précieuse sur les différents immeubles habités par la famille Genet. Calepin Rue Jacob, 1876 (AP D1P4 559). Les
Martin loue un appartement « Par l’escalier à droite dans la
cour : 2e étage, palier à droite. N° 12 : Salle à
manger : 1 fenêtre ; Cuisine : 1 fenêtre ; Pièce à feu : 2
fenêtres ; Pièce sans feu : 1 fenêtre ; Cabinet : 1 fenêtre » à
partir de 1891 pour un loyer annuel de 620 francs, puis en 1897 pour 520 francs.
Un autre locataire occupe l’appartement en 1898.
[73] Fernand Durozé (Paris 20e 16 janvier 1876 –
Bazarnes (Yonne) 28 septembre 1961). Après son baccalauréat obtenu au lycée
Arago de Paris, il entre à 17 ans à l'Ecole Nationale des Beaux-Arts de Paris. Elève
du peintre Gérôme, il commence avec un style classique, mais évolue peu à peu
avec les changements du XIXe siècle : impressionnisme, pointillisme
et expressionnisme. En 1905, Durozé présente son travail pour la première fois
au Salon des Beaux-Arts de Paris. A la fin de sa vie, Durozé se retire
volontairement des cercles artistiques parisiens, de ses amis, et détruit même certaines
de ses œuvres.
[74] Indicateur
lyonnais Henry, annuaire commercial, administratif et judiciaire de la ville de
Lyon et du département du Rhône, 1898, p. 1814. On le retrouve avec cette
activité dans l’Indicateur de 1910,
dans les recensements de 1906 au 1, du quai de la Vitriolerie et de 1911 rue
des Girondins.
[75] La maison et les entrepôts existent toujours à cette
adresse. Ils ont été répertoriés dans le cadre de l’Inventaire général du
patrimoine culturel par la Région Rhône-Alpes. La fiche est consultable sur ce
site : http://www.patrimoine.rhonealpes.fr/
[76] A l’occasion de l’Exposition universelle de Paris en 1900,
le ministère de l’Instruction publique demande à chaque directeur d’école de
rédiger une monographie sur sa commune afin de dresser un tableau de l’état de
l’enseignement primaire. Celle de Varennes, datée du 25 septembre 1899 et
signée de l’instituteur, est numérisée sur le site des ADE :
« Aujourd’hui Varennes possède de belles propriétés qui servent de
villégiature à de riches industriels parisiens. Chaque année de nouvelles
villas s’élèvent sur le coteau dominant la vallée de l’Yères et d’où la vue s’étend
au loin vers le plateau de la Brie. » (p. 30)
[77] Henri Pagat (Paris 11 janvier 1856 – Paris 13 octobre
1919) est un écrivain qui « a publié plusieurs romans d’observation gaie
et de satire politique » dont le plus connu est Le Baron Pangorju, 1884. Il possédait une maison de villégiature
route de Mandres, proche du domicile de Maurice Martin. C’est ainsi qu’il est
témoin au décès de la grand-mère de celui-ci, Elise Eléonore Leygonie, veuve
Pierre Martin, survenu à Varennes-Jarcy le 8 novembre 1906, à l’âge de 94 ans.
[78] Oscar Roty (Paris 11 juin 1846 - Paris 23 mars 1911) est un graveur
français, surtout connu pour La Semeuse,
utilisée sur les pièces de monnaie et les timbres postaux. Il possédait une
propriété à Varennes-Jarcy.
[79] Louis Morin (Paris 5 août 1855 - Migennes (Yonne) 2 juin
1938) est un peintre, graveur, illustrateur et publiciste, fondateur de la
Société des dessinateurs humoristes et membre du Club des Hydropathes (source
BNF). Il habitait Varennes-Jarcy, rue de Vaux-la-Seine (première mention dans
le recensement de 1906, comme Maurice Martin). Son ouvrage Les Dimanches parisiens. Notes d’un décadent (1898) illustre bien
la vie de ces Parisiens à la campagne. Il était suffisamment lié à Maurice
Martin pour que celui-ci lui dédie une des planches de La Grande Danse Macabre des Vifs, publiée en 4 livraisons
(« dixains ») vers 1905.
[80] Répertoire Me
Auguste Fabre, notaire, Brunoy (en ligne sur le site des ADE). N° 221, 9 mai
1902 : Vente par la Vve Louis François Guillaume, née Maria
Augustine Seguin de Combs-la-Ville à Maurice François Alfred Martin, Paris, 5,
rue Suger, de 21 a. 10 ca. d’un bois à Varennes, lieu-dit La Citadelle,
moyennant 2 000 francs dont 1 000 francs comptant.
[81] Vente des 8 mai et 4 juin 1904
devant Me
Fabre, notaire, Brunoy, mai-juin 1904 (ADE 2E82/358) par Louis Oscar Roty, artiste graveur, commandeur de la Légion d’Honneur
pour le prix de 100 francs. Bail du 4
juin 1904 devant Me Fabre, notaire, Brunoy, mai-juin 1904 (ADE
2E82/358) d’Albert Emile Dauvergne, cultivateur, Combs-la-Ville (Seine-et-Marne)
à Maurice François Alfred Martin, dessinateur et Mme Marie Françoise Genet, son
épouse. Bail de 3, 6 ou 9 ans qui commence à courir le 1er juillet
1904, pour une maison située à Varennes, route allant à Périgny,
comprenant : Grand bâtiment d’habitation élevé sur caves, d’un rez-de-chaussée
divisé en 2 cuisines, 2 salles à manger, 2 salons et couloirs, d’un premier
étage divisé en 5 chambres et un cabinet de toilette et d’un grenier au-dessus.
Fournil, grange et poulailler à côté. Grande cour devant, jardin planté d’arbres
fruitiers derrière, dans lequel puits avec pompe. Loyer annuel de 525 francs,
payable par semestre, termes échus, les premiers janvier et juillet de chaque
année.
[82] Bureau de Virieu-le-Grand, Actes sous Seing Privé (AD) : deux actes
enregistrés le 19 octobre 1898 sous les numéros 184 et 185, de la Veuve
François Genet, 1, rue Rousselet, Paris à Philibert Pantin, propriétaire,
Virieu-le-Grand.
[83] Calepin Rue Oudinot, 1876 (AP D1P4/831). Les loyers de ces 11
logements vont de 80 à 160 F. Le bâtiment a disparu, remplacé par un immeuble
début de siècle.
[84] La robe blanche,
in Contes simples, par François
Coppée, 1894. Le conte mériterait d’être cité en entier, tant il donne une
image attachante et bienveillante du petit peuple parisien.
[85] A la différence de l'hôpital Beaujon
qui dépendait de l'Assistance publique, l'hôpital Notre-Dame de Bon-Secours,
situé au 66 rue des Plantes, Paris 14e est une institution privée
desservie par les religieuses hospitalières de l'Hôtel-Dieu de Paris, de
l'ordre de Saint-Augustin, qui comprend 120 lits, répartis dans 6 salles
communes et 18 chambres particulières. L'admission est gratuite pour les
indigents. Pour les autres, le prix journalier est de 3 francs en salle et de 6
francs en chambre particulière. En 1900, le
comité de dames patronnesses, qui s'occupe de réunir les ressources
nécessaires pour l'entretien de l'hôpital et de l'asile de Notre-Dame de
Bon-Secours, est présidé par Mme la marquise de Gontaut-Saint-Blancard et Mme
la Baronne Cochin (source : Manuel des
œuvres. Institutions religieuses et charitables de Paris et principaux
établissements des départements pouvant recevoir des orphelins, des indigents
et des malades de Paris, Paris, 1900, pp. 328-329).
[86] Toutes ces informations sont extraites de Jean Genet, matricule 192.102. Chronique des
années 1910-1944., Albert Dichy et Pascal Fouché, Paris, Gallimard, 2010,
en particulier le premier chapitre : Camille
Genet.
[87] Rappelons que Camille Genet n’a jamais cohabité avec
les enfants du premier lit, Philibert et Marie Françoise, qui ont
respectivement 29 et 27 ans de plus qu’elle. Quant à Gabriel, de 18 ans son
aîné, il s’est engagé lorsqu’elle avait un an et demi. Dans ses jeunes années,
elle a pu les connaître lorsque ses parents ont vécu chez Maurice Martin et
Marie Françoise Genet, puis quand Gabriel Genet a vécu avec sa mère et elle.
Mais, à notre connaissance, à partir de 1896, soit à l’âge de 8 ans, elle n’a
plus vécu avec ses frères et sœurs.
[88] Recensement Lyon, 1911, 4/6 rue des Girondins :
Jules (sic) Genet, né 1859
Virieu-le-Grand, père, F Carton, patron ; Alice Genet, née 1888 Paris, mère (sic),
sans profession. C’est la première fois qu’ils sont recensés à cette adresse.
(site ADR)
[89] Recensement Varennes Jarcy 1911, Grande Rue ;
maison 27 : Maurice Martin, né Boulogne-sur-Seine 1863, imagier, patron ;
Marie Martin, née Virieu-le-Grand (Ain) 1863 (sic), épouse, sans
profession. (site ADE) En 1906, la mère et la grand-mère paternelle de Maurice
Martin vivent avec le couple à Varennes. La mère est ensuite accueillie dans
une maison de retraite payante, située à Vineuil, près de Chantilly (Oise), ouverte
vers 1910 par l’administration de l’Assistance publique de Paris, réservée aux
femmes seules, valides, âgées d’au moins cinquante ans, habitant le département
de la Seine (La revue philanthropique, tome XXVI, 13e année,
novembre 1909-avril 1910, p. 502). Elle y est aussi recensée en 1911. (site
ADO)
[90] Recensement Montreuil 1911, 43, rue des Messiers :
Gabriel Genet, né Virieu-le-Grand (Ain) 1870, employé, patron : divers ; Gabrielle
Genet, née Paris 1874, femme, sans profession ; Maurice Genet, né Montreuil
1897, fils, sans profession ; Germaine Genet, née Montreuil 1898, fille, sans
profession ; Suzanne Genet, née Montreuil 1901, fille, sans profession ; Odette
Genet, née Montreuil 1903, fille, sans profession. (site ADSSD)
[91] Jean Louis Genet est mort à Grenoble, 1, rue Mayen, le
6 septembre 1904. En 1911, nous savons que sa fille Elisa Genet, épouse
Claudius Poiroud, employé des contributions directes, et donc cousine germaine
de Camille, habite Marseille, rue Cherchell. Nous avons perdu la trace des deux
autres fils connus de Jean Louis Genet.
[92] Recensement 1911 Saint-Pierre Quilbignon, Stiff :
Léontine Gestin, née Oron-le-Château 1862, propriétaire [elle est veuve de Jean
Gestin depuis 1902] ; Robert Gestin, né Saint-Pierre 1899, enfant ; Jeanne
Gestin, née Saint-Pierre 1900, enfant ; Louise Genet, née Issoudun 1836, mère,
sans profession ; Adrienne Genet, née Châteaudun 1864, sœur, sans profession ;
Louise Méars, née Saint-Pierre 1884, domestique. (site ADF)
[93] En 1882, l’huissier Piégay de Virieu-le-Grand cherche Claude
Genet, dans le cadre de la faillite de son frère François. Il écrit le 11
septembre 1882 : « J’ai écrit à [François] Genet à Lyon qui m’a écrit
que l’adresse de son frère lui était inconnue. Je me suis adressé à l’oncle et
à la mère de ce Genet à Volliens qui ont égaré l’adresse et n’ont pu me la
donner. Il doit être, disent-ils, appareilleur sur une ligne de chemin de fer
en construction dans le nord, mais où ? Ils ne peuvent fournir aucune
indication. » Les relations étaient pour le moins distendues…
[94] Recensement Virieu-le-Grand 1911, La
Petite Charrière : Claude Genet, né Virieu-le-Grand 1844, charpentier ;
Euphrasie Orset, née Chazey-Bons 1859, femme, cultivatrice ; Maria Genet, née
Virieu-le-Grand 1882, fille, sans profession. (site ADA)
[95] Recensement Lyon 1921, 4, rue des Girondins : Jules Philibert Genet, né 1859
Virieu-le-Grand, père, Fabricant de fusibles électriques, patron : Ph.
Genet ; Alice Marguerite Genet, née 1888 Paris, fille, sans profession. (site
ADR)
[96] Déclaration de mutation par décès, 8 février 1927, n° 75,
bureau de Yerres (ADE 3Q13/76) : « La communauté ne comprend
que : Mobilier assuré contre les risques de l’incendie […] pour un capital
de 53 000 francs. » Comme la mère de Maurice Martin, Virginie Van
Maele, était héritière pour un quart de ces meubles, Marie Genet se met d’accord
avec elle et garde la totalité des meubles contre une rente annuelle de 200 francs.
(Actes sous Seing Privé, bureau de Yerres, 4e trimestre 1926, ADE 3Q13/4.
Enregistrement du 26/10/1926). Notons que le couple Martin-Genet est encore
recensé à Varennes-Jarcy en 1926. Pour la première fois, il est appelé Maurice
Martin, dit Van Maele, artiste-peintre. Virginie Van Maele est décédée à la
maison de retraite de Vineuil-Saint-Firmin (Oise) le 15 avril 1927 à l’âge de
86 ans.
[97] Dépôt de testament olographe, 2 octobre 1931, Minutes Me
Théodore Ravier, Lyon, Octobre-décembre 1931 (ADR 3E37701). Le testament
olographe est daté de Lyon, 30 mars 1910 et signé Alice Genet. Ce testament a
été rédigé quelques jours après le décès de sa mère.
[98] Dépôt de testament olographe, 16 mai 1935. Minutes Me
Théodore Ravier, Lyon, mai-juin 1935 (ADR 3E37716). Le testament olographe est
daté de Lyon, 6 février 1935, et signé Ph. Genet.
[99] Déclaration de mutation par décès, 28 octobre 1935, n° 1030,
3e bureau de Lyon (ADR 3Q33/704)
et 30 octobre 1936, n° 1018, 3e bureau de Lyon (ADR 3Q33/709).
[100] Selon les tables de conversion de l’INSEE, 24 000
francs de 1936 représentent un revenu annuel de 17 150 € (valeur 2013) et 397 000 francs
représentent un patrimoine de 284 000 € (valeur 2013).
[101] Si Marie Genet avait gardé des œuvres et des archives
de son mari, ont-elles été dispersées à ce moment-là ?
[102] Jusqu’au recensement de 1921, c’est le domicile de son
oncle, le peintre Fernand Durozé. On le trouve à cette adresse à partir du
recensement de 1926.
[103] J. Boldo, photographe sportif avant la première guerre
mondiale, s’établit ensuite comme spécialiste en « photographies et
retouches industrielles pour toute impression et publicité », d’abord au
100, avenue Kléber, puis au 5, rue d’Isly à Paris. On trouve de nombreuses
références à son travail, en particulier des photographies de l’exposition
coloniale en 1931, date à laquelle Maurice Genet travaillait pour lui.²²
Quel travail! bravo
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